Ed Wood Jr - Ruban de Möbius
Sorti le: 01/04/2010
Par Christophe Manhès
Label: Swarm Records
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On voudrait négliger la première impression que produit une pochette de disque que l’on n’y parviendrait pas. Elle vous imprime le cerveau aussi sûrement que le veau appelle la sauce Marengo. Judicieuse, celle de Ruban de Möbius, premier album studio des Français d’Ed Wood Jr, ne déçoit pas et plante le décor sans ambages : une simple guitare électrique, une batterie, et quelques amplis pour un style musical qui se devine fruste, le tout emballé dans une esthétique plutôt soignée. Sorties des entrailles du « power-duo » composé d’Olivier Desmulliez à la guitare et Thibault Doutriaux à la batterie, les promesses de ce frontispice ne mentent pas : à partir du minimum requis, Ruban de Möbius beigne méchamment tout en exprimant un sens évident de la finesse.
Ed Wood Jr joue un math-rock pur et dur. Avec son cortège de rythmes expérimentaux et dissonants, cet attentat aux bonnes mœurs du rock ‘n’roll qu’est le math-rock a souvent pour conséquence de faire se dresser d’effroi le poil du vulgum pecus, surtout quand il se pare comme ici des atours peu commodes du noise rock. Or, ce manque d’appétit pour les chemins de traverse est une injustice faite en particulier à un genre musical souvent passionnant, énergique et riche en inventions. Tout comme ce Ruban de Möbius calé entre la complexité de Don Caballero et la puissance tellurique de Dysrhythmia, qui réussit à captiver par son rock dégrossi avec la puissance du marteau-piqueur, affiné par la subtile précision du ciseau du compagnon sculpteur.
Contrairement à ce que pourrait laisser penser son patronyme dans le genre série Z, la musique des Français se situe davantage du côté de l’insolence talentueuse des nanars de Tarantino que de ceux de Max Pécas. Même si les premières écoutes dégagent une certaine frigidité, on finit immanquablement par partir à la découverte de cette musique dont le plaisir se loge dans le foisonnement de son jeu créatif. Pour peu que vous ayez les yeux de Belle, derrière la Bête se discerne un monde vraiment captivant.