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Tortoise
10/09/2009
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Par Brendan Rogel
Photos:
Site du groupe :
CONCERT : TORTOISE
La Route du Rock est connue pour être une grande liesse populaire qui a le culot de proposer une programmation éclectique, donc risquée. C’est une route parsemée de hippies fêtards et de cadavres vitreux que les téméraires doivent traverser afin d’assister à la prestation de Américains pour leur unique date hexagonale. Avec Tortoise, nul doute que la qualité est au rendez-vous à chaque nouvel album. Modulée avec les années, la formation s’est pourtant toujours fixée comme but de surprendre et de parvenir à créer par tous les moyens possibles. Associés à tort à cette scène post-rock bourrée au Prozac et férue de crescendos à rallonge, ces patriarches de Chicago ne se sont jamais limités aux conventions et persistent à faire fi des étiquettes. Chez eux, point de pathos, c’est un univers bourré de couleurs et de reliefs qu’aucun autre groupe n’a pu imiter sans un arrière-goût d’ersatz. A 21h30 pétantes arrivent ce qui semble être les doyens du festival. Ils ont la bonhomie de quinquagénaires, décomplexés et sans prétention, bien à l’image de leur son. A musique atypique, formation atypique : la scène regorge d’instruments et à eux cinq se partagent une basse, deux guitares, trois claviers (qui se taillent effectivement la part du lion sur le dernier album), deux xylophones, et deux batteries disposées sur le devant de la scène, face-à-face. Aucun d’eux ne reste coincé sur un seul instrument pendant toute l’heure et demi de prestation. Bref, une telle polyvalence promet de bien belles choses. Entre musique dépouillée et volatile, ce show ne peut trouver meilleur équilibre pour se rendre accessible sans faire de compromis. Les esgourdes un peu égarées trouvent leur salut auprès des claviers délicieusement cheap, ou encore pour ces deux batteurs d’un groove et d’une dextérité irrésistibles. Que ce soit pendant une accalmie ou un climax, le duo prend toujours autant de plaisir à se défier l’un l’autre avec une énergie et une bonne humeur évidente. Pour clore de manière admirable, Tortoise choisit alors deux de ses titres phares : le fameux « TNT », qui ne souffre d’aucune absence de cuivres, reste toujours aussi poignant et aérien, tout comme l’air d’hymne patriotique de « Seneca ». La conclusion semble inévitable lorsque Dan Bitney abandonne sa guitare pour se rendre au devant de la scène afin d’inviter le public à frapper dans ses mains avec lui (sur un rythme plutôt complexe, Tortoise oblige). L’auditoire prend bien deux minutes à l’imiter, tandis que ses compagnons quittent leur place pour rejoindre Dan, jusqu’à ce que tout le monde finisse par claquer des mains en harmonie. Une belle leçon de musique et d’humilité. Brendan Rogel site web : Tortoise |