Ange
19/06/2008
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Par Jérôme Walczak
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CONCERT : ANGE
La joie, le rêve, la truculence : la force d’un groupe enraciné dans nos vie depuis près de quarante ans, qui s’est remodelé avec le temps en conservant sa puissance et sa créativité. Rien de tel qu’une réunion parisienne de vieux briscards du rock progressif français pour s’en émerveiller. ProgLaVie nous offre régulièrement de bien jolis cadeaux, en ces temps où la location d’une salle s’avère être un véritable parcours du combattant tant les prix sont prohibitifs, où il n’est pas forcément certain que le public soit au rendez-vous, où la nostalgie est parfois meilleure vendeuse que la joie de retrouver nos pères à tous, tels qu’Ange, ces immortels, pleins d’un courage qui se doit d’être salué. L’association a tenté le pari, et ces joyeux fous ont eu raison, parce que c’est un moment de paradis auquel le petit public de la Locomotive a été convié, tandis qu’en sous sol frétille une autre faune, venue s’encanailler à la soirée Black Blanc Beur. Quel contraste avec le rez-de-chaussée où se côtoie anciens jeunes et futurs vieux de la terre ! Tout commence avec les Ch’ti de Xang, près de quarante-cinq minutes de rock instrumental, parfois musclé, au son irréprochable, dans des ambiances légèrement filandreuses mais attachantes. Fort d’un second album au joli potentiel, le groupe sait capter l’attention des personnes qui ne les connaissent guère, en leur faisant visiter de nouvelles contrées, parcourues avant eux par Marillion, Muse ou Cairo (telles sont les influences, parfois mâtinées de jazz, que votre humble serviteur a cru déceler). Xang, c’est bon, c’est bien. Relevant l’exercice avec brio, leur départ de la scène ne se fait pas sans regrets. Ange version 2008 : un Christian Décamps extraordinaire, un Père Noël fantasque et égrillard, qui, avec sa voix, son gros ventre, ses yeux, son sourire, ses phrases, nous a montré à quel point le groupe reste présent dans le paysage français du rock progressif. Une grande partie de Souffleur de Ver a été réinterprétée, et force est de constater que ce disque prend une nouvelle dimension sur scène, environné de ce sixième et obligatoire membre : le public, facilement domptable, bien qu’aguerri, qui ne demande qu’à se lever de plaisir lorsque sonnent dans son cœur des moments intenses : « Les Noces », « La gare de Troyes », la douce « Aurélia », qui surgit des tréfonds de nos mémoires pour enchanter une soirée colorée et magique. Comme Aurélia, Caroline Crozat, avec son regard de feu, sa farandole en compagnie de la mort elle-même, ses mimiques dramatiques et féériques, donne la réplique à un Christian évoluent dans une folie douce, majestueuse et impériale, dont il nous est impossible de savoir si chaque minute est préparée ou improvisée. Quelques belles phrases viennent ponctuer la soirée telle : « la vie est un sursis, la mort une tolérance, mes amis, il nous reste le rêve ! » que déclame Décamps, et les autres musiciens, de reprendre en saccade la verve d’un mentor qui sait s’effacer. Tristan Décamps, aux claviers, jeune lutin fou qui devrait chanter plus souvent tant cette voix magique, une des plus belle du prog’ français, voire du rock contemporain, est un bijou dont le reste du groupe est le resplendissant écrin. Thierry Sidhoum et Benoît Cazzulini viennent ajouter leur posture dégingandée à cet ensemble, enveloppé par le regard de braise d’Hassan Hajdi. Après deux heures fabuleuses, on se résout de partir et d’aller torcher on ne sait quels autres culs d’on ne sait quels autres firmaments, en sachant, du plus profond de notre cœur, que jamais, non, jamais, un ange ne meurt… Jérôme Walczak site web : http://www.angemusic.com |