Hiromi's Sonicbloom - Time Control
Sorti le: 13/12/2007
Par Jean-Philippe Haas
Label: Telarc
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La jeune prodige du jazz Hiromi Uehara n’aura pas attendu bien longtemps avant de rencontrer la notoriété. L’accueil enthousiaste et les distinctions dont a bénéficié son premier album, Another Mind en 2003, ont exposé à la face du monde – du moins à la face du monde du jazz – la forte personnalité, l’indéniable talent et le charme de la claviériste japonaise.
Time Control est déjà le quatrième album de Hiromi, et si Progressia a souhaité en dire quelques mots, c’est parce qu’il cabote très près des rivages de la fusion progressive. Cet album est-il dès lors différent de ce qu’a proposé Hiromi depuis 2003 ? Pas vraiment, si l’on considère que la demoiselle n’a jamais vraiment respecté les canons du jazz et régulièrement taquiné la fusion ( « Kung-Fu World Champion » sur Brain, 2004, constitue un bel exemple de ce dont Hiromi est capable dans ses accès de rébellion). Les audaces affichées par la jeune dilettante du jazz sur Time Control atteignent néanmoins un niveau inédit.
Contrairement aux trois précédents albums, celui-ci est un effort collectif, ce qui explique sa parution sous le nom de Hiromi’s Sonicbloom, entité regroupant ses acolytes, le bassiste anglais Tony Grey et le batteur slovaque Martin Valihora, et incluant la participation du versatile guitariste David Fiuczynski. Hiromi décline tout au long de l’album les paradoxes et autres affres du temps, situations vécues et sentiments éprouvés par l’artiste lors de ses voyages aux quatre coins du monde pour se produire. Time Control s’ouvre sur un « Time Difference » au puissant parfum de jazz-rock. Dans son désir constant de s’affranchir des limites du genre dans lequel elle évolue, Hiromi dispose de cette faculté étonnante de mêler dans un même titre le jazz le plus canonique à la plus bouillonnante fusion (« Time Out », « Deep into the Night »), alternant solos de piano avec solos de synthétiseur, et laissant les fantasmes débridés de David Fiuczynski s’exprimer librement, chacun des musiciens bénéficiant par ailleurs de son heure de gloire (« Time Control, or Controlled by Time »). Alors que « Time Travel » semble tout droit sorti d’un album de Chick Corea époque Return to Forever, « Real Clock vs. Body Clock = Jet Lag » finit de démanteler complètement le concept de jazz académique.
Si Time Control reste clairement enraciné dans le jazz, il est tout aussi évident que les incessantes libertés prises par Hiromi séduiront les aventureux du genre comme les amoureux de l’hybridation musicale. Les frileux quant à eux se laisseront convaincre par l’énergie débordante de la demoiselle.