SGM

25/06/2007

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Par Christophe Manhès

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Site du groupe :

CONCERT : SLEEPYTIME GORILLA MUSEUM

  Lieu : La Scène Bastille (Paris)
Date : 18 avril 2007
Photos : Aleks Lézy et Christophe Manhès

En l’espace de deux albums, Sleepytime Gorilla Museum s’est facilement imposé au panthéon du métal insolite. Leur musique possède une sorte de « grand style » particulièrement novateur, composé de violences telluriques comme de grandes finesses, le tout emballé dans une virtuosité jamais démonstrative. Nous nous sommes donc précipités à la Scène Bastille pour l’une de leurs toutes premières dates françaises, occasion de vérifier si sur scène, le groupe affiche les mêmes ambitions que dans ses brillantes créations studio.

Set-list SGM : The Companions – Helpless Corpses Enactment – Phthisis – The Widening Eye – Powerless – 1997 – Sleep Is Wrong – Rappel : The Donkey

Ça commence par une mauvaise nouvelle : la soirée sera partagée en trois parties relativement courtes et égales, ne laissant espérer à Sleepytime Gorilla Museum — au mieux — qu’une heure de show. C’est une vraie déception, mais les contraintes horaires de la Scène Bastille sont draconiennes. Du coup, on se prend à redouter tout dérapage des prestations de City Weezle et Sebkha-Chott qui pourrait amoindrir le temps de passage des Américains.

City Weezle

Heureusement, à l’heure dite – vingt heures – le concert des Parisiens de City Weezle ouvre le programme devant une salle encore inanimée. Il faudra peu de temps pour deviner les principales influences, américaines, du groupe : Primus pour leur goût de la rythmique syncopée et Mike Patton pour les vocalises — c’est d’ailleurs une nouvelle occasion de mesurer l’incroyable impact du style de ce fou chantant en nos contrées. Mais si Primus peut parfois se révéler agaçant par son approche aride et déconcertante du rythme, City Weezle est, quant à lui, plus chaleureux et donc susceptible de toucher un public moins averti. Jusqu’à la fin de son show, quarante minutes plus tard, on peut dire que le groupe a mené une bonne prestation, technique et bien en place, mais dont il ressort quand même un certain manque, celui d’une personnalité capable de capter un peu plus notre attention. Dommage, surtout quand on sait qu’ils s’inspirent d’aînés qui ont su, de ce point de vue, largement donner l’exemple.

Sebkha-Chott

De la personnalité, en revanche, Sebkha-Chott n’en manquera pas. À tel point que le groupe n’aura aucun mal à se mettre rapidement le public dans la poche, avec une prestation ludique et complètement déjantée – mais alors complètement ! , sorte de « péplum néo-futuristique burlesque », qu’ils disent. Et la musique dans tout ça ?… Un cocktail plutôt foutraque combinant métal débridé, salsa, disco, reggae et bien d’autres choses difficiles à décrire mais qui collent finalement bien à l’esprit de leur prestation : extravagante ! En contrepartie, on a des doutes sur la précision musicale de l’ensemble sur scène, l’esprit délirant du groupe prenant largement le pas sur la performance instrumentale. Qu’importe, le groupe a gagné son pari de nous amuser et la bonne humeur a gagné la salle, impatiente de retrouver enfin Nils Frykdahl et sa bande.

Sleepytime Gorilla Museum

Hélas, à 21h30, Sleepytime Gorilla Museum commence à peine à installer son matériel sur scène. Son show ne débutant que dix minutes plus tard, c’est un peu dépité que l’on s’aperçoit qu’il ne reste pas plus de cinquante minutes de prestation…
Sur scène, un concert de Sleepytime Gorilla Museum, ça donne quoi ? Les gars de San Francisco sont entourés d’un grand nombre d’instruments, la plupart customisés, avec une mention spéciale à Dan Rathbun pour sa basse en forme de poutre, dimensionnée à la taille de ce géant aux airs de Rutger Hauer, tout droit sorti de Blade Runner. Ne sont en reste ni Carla Kihlstedt, qui joue d’un mystérieux violon slide, ni Michael Mellender, entouré d’une quantité invraisemblable de percussions plus fantaisistes les unes que les autres. Du coup, Nils Frykdahl passe un peu pour le monomaniaque de la bande, avec sa seule guitare. Mais en maître de cérémonie charismatique à la voix gutturale et rageuse, il est très concentré sur son rôle de frontman. Quand aux costumes et aux maquillages, ils sont fidèles à l’esprit de leur musique, atypiques, et oscillent entre un postmodernisme dans le goût des visions apocalyptiques des films de John Carpenter et un néotribalisme vaguement amérindien. De toute évidence, le groupe ne semble pas se prendre complètement au sérieux, en affichant sa bonne humeur sur les planches et, surtout, une vraie envie de jeter toute son énergie à la face du public.
Quand le set débute, on est d’emblée saisi par le son, ou plutôt par l’incroyable fracas – près de 105 dB ! Une tuerie. Pour autant, et c’est étonnant, celui-ci reste bon, même si les superbes passages contrastés des versions studios sont ici nettement écrêtés au profit d’une musique beaucoup plus brute, gagnée par l’urgence et la rage.
Les deux premiers titres sont enchaînés. Issus de leur prochain album (« The Companions » et « Helpless Corpses Enactment »), ils déconcertent un peu. Difficile à ce stade de dire clairement de quelle évolution In Glorious Times sera peut-être représentatif, mais, sur scène, on est un peu dérouté par le manque d’impact immédiat de ces deux morceaux. Néanmoins, on reste en terrain connu. Le reste de la set-list, issu des deux premiers albums, ne fera que renforcer cette étrange impression, car dès les premières notes de « Phthisis » le public exulte enfin, la musique claque et la rage de Nils redouble. C’est une véritable furia que même le violon de Carla aura du mal à tempérer. Le groupe est complètement à l’unisson quand, le temps d’intercaler à nouveau un autre titre du nouvel album (« The Widening Eye ») et pour Matthias Bossi de changer l’un de ses fûts, décroché sous ses coups de butoirs, déboulent enfin les énormes et emblématiques « Powerless », « 1997 » et « Sleep Is Wrong », amphétaminés et jouissifs. Ces titres sont joués de manière vraiment impressionnante, preuve des qualités scéniques et des compétences musicales du groupe. Michael et Matthias font le spectacle en percutant tout ce qu’ils peuvent, révélant ainsi la formidable richesse rythmique du groupe. La belle Carla fait hurler ses cordes sans complexes. Nils éructe tout en bombardant ses riffs comme un vrai seigneur. Quant à Dan, ce n’est plus un bassiste, c’est un artilleur…

Déjà 22h25, et la fin du concert approche; mais le public, mis en appétit, en redemande. Visiblement, pas certain d’avoir le temps ni l’autorisation de jouer un rappel, le groupe fait mine de sortir. Heureusement, ils reviennnent et achèvent leur prestation par un rappel magistral, avec un « The Donkey » bien dans la veine des morceaux précédents : vigoureux et servi avec une grande maestria.

En plus d’être des musiciens sympathiques et de savoir impliquer le public, Sleepytime Gorilla Museum sait être, sur scène, aussi puissant qu’intelligent, aussi précis que débordant, comme les meilleurs groupes. Ce concert fut donc un excellent moment et a donné au public parisien une belle idée du talent du groupe, en dépit d’une prestation vraiment beaucoup trop courte.

Christophe Manhès

site web : http://www.sleepytimegorillamuseum.com/

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