Djam Karet - Recollection Harvest
Sorti le: 12/11/2005
Par Djul
Label: Cuneiform Records / Orkhestra
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Djam Karet est un groupe instrumental « pas comme les autres ». On avait laissé les Américains à un dernier album studio, A Night For Baku (2003), un recueil de chutes de studio et un live en 2004. On les retrouve aujourd’hui avec leur offrande annuelle, un véritable album, ou plutôt un double E.P.. L’idée fondatrice de Recollection Harvest est de proposer deux facettes du groupe, un peu oubliées depuis que Djam Karet s’était engagé sur une voie plus électrique et puissante en 2001 : des morceaux planants à la Floyd, mâtinés d’electronica moderne, et des titres acoustiques aux influences folk et musiques du monde. Le groupe oublie donc pour un temps ses envies de fusion et ses délires « crimsoniens », qui n’ont d’ailleurs de commun avec Fripp & Co que le goût pour les dissonances.
A l’image d’une formation comme Gordian Knot, Djam Karet est capable de développer une musique qui se passe de voix, ce « défaut » souvent rédhibitoire lorsque l’écriture n’est pas à la hauteur, est ici compensé par une grande richesse instrumentale, des compositions à tiroirs et surtout des mélodies fortes, qui constituent le principal atout de Recollection Harvest, plus encore que sur tout autre album précédent des Américains. Dès le pavé « The March To The Sea Of Tranquility », on se délecte de ces idées à la pelle, à l’image de l’introduction martiale à la mélodie torturée, qui suit un break à la guitare acoustique très proche d’un Pink Floyd dernière période.
Les aspects les plus techniques de la musique du Djam figurent également sur certains morceaux, comme « Dr. Money », gorgé d’orgue Hammond et de mellotron (quatre des cinq membres jouant du clavier sur l’album !), porté par un rythme effréné et enflammé par des soli « fusion » de Mike Henderson. Véritables montagnes russes, les compositions de la première partie de l’album rappellent tout à la fois « B.L.U.E. » (la basse profonde de Aaron Kenyon fait merveille), la seconde partie de « Shine On Your Crazy Diamond » ou Camel sur les passages les plus calmes : sacrées références !
Indian Summer correspond aux atmosphères les plus calmes développées par Djam Karet, sans renier les ambitions contemporaines du quintet, comme en témoignent le morceau-titre inspiré par Steve Roach et ses mélodies analogiques, ou encore le folk sophistiqué et truffé d’effets électroniques et de percussions tribales de « Open Roads » ou l’ambient « Twilight In Ice Canyon ».
La diversité des ambiances et la richesse de l’instrumentation (luth, theremin, guitare slide, séquenceur, etc.) empêchent de se lasser et maintiennent même l’attention de bout en bout, soit soixante-dix minutes sans une parole ! Voici donc un disque hautement recommandable, à l’attention des amateurs de musiques instrumentales intelligentes et à fortes intonations progressives, puisqu’une telle formule est finalement rare dans le paysage musical actuel. Il s’agit probablement du meilleur album studio du groupe après quinze années de tâtonnements, tant du point de vue des compositions que de la finesse de la production.