NDIO - Airback

Sorti le: 17/12/2005

Par Jean-Daniel Kleisl

Label: Cuneiform Records / Orkhestra

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Le chroniqueur doit rendre sa copie, les labels veulent des résultats immédiats… Presque forcé, il écoute l’album en question et, en même temps, le téléphone sonne, ses enfants viennent lui montrer un dessin, les œufs cuisent… Résultat immédiat, il laisse tomber cet album qu’il croit insignifiant, il l’oublie. Mais un beau jour, il se dit : « bon, cette fois-ci, il faut que je m’y mette ». Et là, c’est le miracle !

NDIO, ou Never Dance in Orange pour les intimes, est le projet du Néerlandais Frank van der Kooij. Très connu dans le milieu du jazz rock européen, celui-ci s’est adjoint les services de compatriotes expérimentés ainsi que du non moins célèbre Hugh Hopper qui, comme chacun sait, a sévi dans Soft Machine. On a donc tous les ingrédients à disposition pour créer une très bonne cuisine et Airback, le deuxième album de NDIO, a de quoi réjouir les papilles auditives ! Mélangeant allégrement un jazz rock à la Soft Machine avec du jazz fusion, NDIO apporte des couleurs diverses et variées. Bien sûr, cette base fusion jazz / progressif canterburien est très classique, à l’instar d’un des deux morceaux écrits par Hopper, « Big Bombay », avec cette rythmique groovy et pulsante donnée par la basse samplée sur laquelle se greffent les entrejeux mélodiques de Frank aux saxos et de Robert Jarvis au trombone. On sent la présence invisible de Mike Ratledge !

La suite de l’album reste dans cette atmosphère, lorgnant parfois vers des ambiances plus sombres comme sur « Mr. Barn » où Robert Jarvis excelle. L’album est une divine concoction de jazz rock seventies dans laquelle se mêlent de nombreux samples, parfois très réussis comme dans « Last Night of the Prawns », et qui apportent une touche moderne.
Il faut mentionner aussi le travail absolument remarquable de Niels Brouwer à la guitare, qui n’hésite pas à utiliser des sons tout à fait inhabituels dans le jazz rock, et les tricotages pianistiques de Paul Maassen, qui apporte une richesse harmonique rare (« Soap »). Les compositions (dont deux tiers sont l’œuvre de Frank van der Kooij lui-même) sont dans l’ensemble très réussies et malgré une influence canterburienne non négligeable, elles n’ont qu’un rapport très lointain avec ce que pouvait faire Soft Machine à l’époque.
Néanmoins, à ces mets tous aussi succulents les uns que les autres, il manque une petite touche d’assaisonnement, que l’appelle production. Pour des amateurs de jazz, elle sera parfaite, très claire… mais en fait, trop claire pour nos oreilles. On aurait aimé plus de folie de la part de Frank van der Kooij. Pourquoi cet accompagnement si léger à la batterie dans « Big Bombay » alors que les parties de Hugh Hopper sont si massives ? Ce n’est pas la qualité du jeu de Pieter Bast qui est remise en cause, mais une vision peut-être un peu trop linéaire de la musique de la part du compositeur hollandais. C’est d’ailleurs un problème qui se pose souvent aux formations de jazz : le manque de puissance dans la production, comme une volonté inconsciente d’être trop propre.

Ne boudons toutefois pas notre plaisir cet Airback est des plus réussis, et espérons que ce n’est pas la dernière collaboration de la paire van der Kooij – Hooper (ils avaient déjà joué ensemble à la fin des années quatre-vingt) !
Encore une superbe parution à mettre au crédit de Cuneiform Records. Gageons que le label américain saura encore nous éblouir ces prochaines années. Nous avons d’ailleurs ouï-dire que des sorties prévues prochainement valaient le déplacement !