Soft Machine - Middle Earth Masters

Sorti le: 10/03/2008

Par Jean-Daniel Kleisl

Label: Cuneiform Records / Orkhestra

Site:

Eté 1967, Saint Tropez. Quatre andouilles – Robert Wyatt, Kevin Ayers, Mike Ratledge et David Aellen – participent à une série de happenings dont le thème est l’œuvre de Picasso, Le Désir attrapé par la queue, jusqu’au moment où les flics (accompagnés par les gendarmettes ?) interviennent. Ce fut le début de la grande réputation dont allait jouir Soft Machine en France. Réputation qui culminera en 1969 avec le second album dûment décoré de l’ordre de la Grande Gidouille par le Collège de Pataphysique. Certes, ces anecdotes ne servent pas à grand-chose à la présente chronique mais j’avais juste envie d’y mentionner « Grande Gidouille ». Comme c’est maintenant fait, et plutôt deux fois qu’une, soulignons encore que le groupe perdra David Aellen, qui est Australien, en rentrant en Angleterre. En effet, des problèmes de passeport obligèrent celui-ci à rester en France. Il y formera Gong.

Cela n’empêcha pas les trois gusses restants de continuer à tourner intensément, en particulier dans leur fief du Middle Earth au Covent Garden à Londres. Disons-le d’emblée, les Middle Earth Masters, enregistrés pour l’essentiel en septembre 1967, ont un caractère avant tout historique et seront principalement désirés par les amateurs de la période psychédélique du groupe dans la mesure où ils précèdent de quelques mois la sortie de son premier album. En effet, la qualité de ces enregistrements est pour le moins mauvaise, en particulier pour les vocaux quasiment inaudibles. Il nous faut néanmoins noter que le travail de restauration effectué par Michael King pour Cuneiform Records est remarquable. Il a réussi à redonner vie à des bandes dont on croyait qu’elles étaient tout bonnement impubliables !

Soft Machine est alors en pleine progression créative et mêle avec une facilité déconcertante pop, jazz et psychédélisme. Passé les trois premiers morceaux – les moins intéressants du disque –, on se jette à corps perdu dans des improvisations déjantées et dans ce qui formera les deux premiers albums, mettant en évidence l’influence majeure qu’aura Soft Machine sur toute une partie de la musique pop et rock. Soutenu par cette incroyable paire rythmique que forment Robert Wyatt et Kevin Ayers, Mike Ratledge fait feu de tout bois avec son orgue dont la sonorité est l’une des plus originales de la décennie 1966-1975. Bref, en faisant fi de la qualité sonore de ces bandes, on a devant soi un must en la matière ! Et l’on peut en tous les cas remercier Cuneiform de mettre ces documents historiques officiellement à disposition du public. Par ailleurs, si ce genre d’initiative pouvait inspirer la direction de la Warner à sortir enfin de façon officielle les concerts de Cream au Grande Ballroom de Detroit en octobre 1967, prévenez-nous, nous en serions les premiers étonnés !