The Dillinger Escape Plan - Ire Works
Sorti le: 05/03/2008
Par Jean-Daniel Kleisl
Label: Relapse Records
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L’année 2007 fut musicalement très riche et le nombre de chroniques avec mention publiées dans nos pages en est une preuve. Néanmoins, il arrive que certains albums passent au travers du filet, comme ce fut le cas pour Ire Works. C’est avec un certain plaisir que Progressia comble aujourd’hui cette lacune car, il faut bien l’avouer, ce disque, c’est de la « poutre en barre » !
Pourtant tout ne fut pas aisé depuis la sortie du très réussi Miss Machine en 2004. Dillinger Escape Plan – DEP pour les intimes – est certes habitué aux changements de personnel, mais au moment où allait commencer l’enregistrement du nouvel opus, Chris Pennie, batteur et membre fondateur, a annoncé son départ immédiat du groupe pour rejoindre Coheed and Cambria. Force est d’avouer que l’on cherche encore l’aspect purement artistique de cette démarche, Coheed and Cambria n’étant pas particulièrement connu pour donner une importance centrale au batteur, contrairement à DEP, justement. Cet épisode a laissé l’unique rescapé de la formation originelle, le guitariste Benjamin Weinman, seul aux commandes. Ce dernier a rapidement pu trouver un remplaçant en la personne du batteur de Stolen Babies, Gil Sharone, choix magistral en définitive ! Il n’est dès lors pas étonnant que l’album se dénomme Ire Works.
Pour les lecteurs non habitués aux musiques extrêmes, DEP est, avec Converge, l’un des fers de lance du metalcore technique, appelé plus couramment mathcore. Il se permet d’y mêler des parties jazz et progressives avec un malin plaisir ! Le groupe a sorti trois albums et quelques Eps, dont un avec un certain Mike Patton. Jouant dans la catégorie des groupes les plus violents de la planète (Calculating Infinity en 1999), DEP avait quelque peu adouci son propos avec Miss Machine, laissant aigris quelques fans de la première heure en raison d’un ou deux morceaux que l’on pourrait qualifier de pop (« Unretrofied »).
Ire Works poursuit dans la voie initiée par Miss Machine, tout en allant plus loin ! En trente-huit minutes et treize morceaux intenses (dont huit aux alentours de deux minutes), le groupe du New Jersey varie bien plus son menu que les trois derniers albums réunis de Dream Theater ! Evidemment, pour montrer que le groupe n’a rien perdu de son énergie folle, « Fix Your Face » et « Lurch » débutent le disque en démontant tout sur leur passage : rythmiques de folie, riffs infernaux, hurlements à la mort d’un Greg Puciato en grande forme. Tout est fait pour dégoûter le gentil progueux ! Il aurait pourtant tort de s’arrêter là car dès « Black Bubblegum », un tout autre chemin est pris, celui d’une pop metal de haute volée mêlée d’electro ! De plus, ce morceau est étonnement très mélodique, structuré en couplet et refrain, avec la superbe voix, chantée cette fois-ci, de ce caméléon de Greg Puciato, dont les accointances vocales avec Mike Patton sont à souligner !
Mélangeant avec bonheur expérimentations electro dignes des meilleurs Nine Inch Nails, murs de riffs ravageurs, accélérations rythmiques rageuses, passages mélodiques hyper travaillés, chaque morceau de Ire Works est un évènement en soi ! Les arrangements très soignés bénéficient d’une instrumentation très riche, qui met habilement en valeur le travail des guitares et de la batterie (piano, claviers, violon sur « Nong Eye Gong » – qui fait passer Sleepytime Gorilla Museum pour des enfants de chœur, cuivres à la Tarantino sur le très réussi « Milk Lizard »).
Bénéficiant d’une production absolument parfaite en tous points – merci Steve Evett ! – Ire Works mérite indéniablement une place parmi les meilleurs albums de l’année passée. Finalement, un seul reproche : pourquoi Dillinger Escape Plan ne sort-il qu’un album tous les quatre ans ? A voir en concert, absolument !