Jónsi - Go
Sorti le: 03/05/2010
Par Jérôme Walczak
Label: EMI
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De l’Islande, la majorité de la population aura ces derniers temps retenu une impressionnante éruption : la sortie de l’album solo du chanteur et metteur en scène de Sigur Rós, Jón Thor Birgisson, popularisé sous le doux pseudonyme de Jónsi. Ce dernier s’était déjà essayé à des projets plus personnels, hors d’un groupe qui aujourd’hui n’a strictement rien à prouver en terme de crédibilité et de popularité, notamment en publiant, avec son compagnon Alex Somers, Riceboy Sleeps en 2009. Ce projet qui proposait une longue mélopée au son âcre et minéral, quasi instrumentale, qui n’aurait pas totalement détoné chez un Thom Yorke mélancolique et sombre.
Le parti-pris de Go est cette fois radicalement différent, et rejoint pour partie les intrusions dans le monde de la pop déjà initiées avec Með suð í eyrum við spilum endalaust : des chansons enlevées et virevoltantes, des mélodies vivifiantes et tout simplement explosives. Jónsi s’essaie ici à ouvrir des espaces de libertés, et propose une musique aérienne, toujours interprétée en anglais, contrairement à la plupart des titres de Sigur Rós, dont les paroles étaient rédigées en « Vonlenska », idiome totalement inventé par le maître des lieux.
De l’aveu même de Jónsi, il s’agissait avec Go de présenter au public des titres qui ne correspondaient pas réellement au cahier des charges classique de Sigur Rós. C’est un fait, des titres tels que « Go Do », « Animal Arithmetics » ou « Boy Lilikoi » sont de réels moments pop, des chansons joyeuses qui risquent de désarçonner l’auditeur passablement échaudé par Með suð í eyrum við spilum endalaust. Chacun de ces titres rappelle en effet le primesautier Gobbledigook, qui s’éloignait très franchement avec les productions mélancoliques et glaciales auxquelles le public était alors habitué.
Le second versant de cet album, justement, permettra aux habitués de sonder des terrains déjà bien connus. Avec des titres tels que « Grow Till Tall », « Sinking Friendship » ou « Tornado », la voix de falsetto si caractéristique de Jónsi est poussée à son acmé, et d’intenses moments d’émotion sont immanquablement au rendez-vous. Il semblerait que dans ce premier projet en solitaire, Jónsi, qui a bien su s’entourer (Alex Somers, Peter Katis d’Interpol, le batteur Samuli Koskinen, entre autres), entrouvre progressivement son univers personnel. On découvre un véritable personnage, mi homme-mi oiseau, qui plane joyeusement au dessus de nos têtes en dissolvant tant et plus les nuages de cendres qui, parfois, noircissent nos horizons tumultueux…