Trettioåriga Kriget - War Years

Sorti le: 28/04/2009

Par Jean-Daniel Kleisl

Label: Mellotronen

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Depuis son retour en 2003, après une parenthèse de deux décennies, Trettioåriga Kriget n’en finit pas d’étonner, à tel point qu’il relance presque à lui seul une scène progressive suédoise moribonde. Non seulement le groupe peut se targuer d’être l’une des plus importantes influences de ce prog revival suédois des années quatre-vingt-dix (Landberk, Änglagård et surtout Anekdoten) mais également celui qui en quelque sorte le perpétue à l’heure actuelle avec Anekdoten. Les deux derniers albums du groupe, I början och slutet (2007) et surtout Elden av År (2004) ont reçu un excellent accueil. Qu’en sera-il avec War Years, le dernier double live en date ?

Le premier disque regroupe une série de morceaux enregistrés en concert entre 1971 et 1981 en Suède et incarne l’évolution du groupe au cours de cette décennie. La période 1974-1978 (oublions les deux minutes datant de 1971), qui comprend les trois premiers albums à savoir Trettioåriga Kriget (1974), Krigssång (1976) et Hej på er (1978), représente l’âge d’or scénique et discographique des guerriers trentenaires. Entre l’urgence et la violence du premier album éponyme (« Handlingens skugga »), les constructions complexes mais pas alambiquées du second (« Krigssång II ») et l’approche faussement jazz du troisième (« En kväll hos X »), Trettioåriga Kriget sait à la fois varier les plaisirs et maintenir en haleine l’auditeur. Ce qui frappe en premier lieu, c’est cette section rythmique hallucinante – la basse Rickenbacher qui fait « chtong » – et qui inspirera Anekdoten. Ensuite, les soli magiques de Christer Åkerberg à la guitare incarnent une certaine quintessence dans le genre, entre un Eric Hendrix et un Frank Beck. Enfin, Trettioåriga Kriget ne cultive pas le propre sur lui. Au contraire, le son est volontairement sale et hargneux. D’aucun le décrive non sans raison comme du crossover progressif. Ajoutez à cela les ratés de la voix de Robert Zima dans ses falsettos de castrat dont l’opération aurait mal tourné et vous obtenez un très bon live bien brut. Mentionnons toutefois que les morceaux des années 1979–1981, à partir de la plage dix, demeurent moins inspirés et inspirants, presque trop pop en fait.

Le second disque permet d’écouter Trettioåriga Kriget dans les conditions optimales des concerts actuels. A l’exception de trois morceaux enregistrés dans leur pays d’origine en décembre 2007, les Suédois présentent leur prestation du Progday Festival du 5 septembre 2004, leur premier concert jamais joué aux Etats-Unis d’Amérique. En trente ans, les bougres n’ont rien perdu de leur hargne et de leur qualité de jeu. De plus, ils savent parfaitement où se situe leur force, à savoir dans leurs trois premiers albums, puisque ceux-ci ne constituent pas moins des trois quarts des morceaux présentés sur ce disque. Le reliquat provenant des deux derniers opus n’est pas en reste non plus. Un « Lång historia », même si plus posé et assagi, n’aurait pas dépareillé sur Krigssång.

War Years est un excellent live qui permet aux néophytes de découvrir ce groupe intriguant qu’est Trettioåriga Kriget, tant par ses forces, cette finesse alliée à une puissance rythmique et mélodique rarement atteinte en Suède, que par ses faiblesses, comme cette dernière partie du premier disque ou le chant qui, par ses inflexions, peut parfois prêter à sourire malgré sa conviction de tous les instants. Les connaisseurs auront quant à eux une nouvelle fois la preuve de la qualité scénique des Suédois. Cela fait plus de trente ans maintenant que Trettioåriga Kriget mène une guerre dont on sait maintenant qu’elle a été gagnée : la reconnaissance.