Pain of Salvation - Linoleum
Sorti le: 16/11/2009
Par Marjorie Alias
Label: InsideOut Music
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Pain of Salvation aura décidément connu quelques turbulences au cours des derniers mois : changements de line-up avec le départ du bassiste Simon Andersson et l’intronisation du frenchie Léo Margarit aux baguettes (sans mauvais jeu de mots), annulation d’une tournée américaine aux côtés de Dream Theater et soucis de label qui n’auront pas aidé à la réalisation du successeur du quelque peu controversé Scarsick sorti en 2007.
« Tu enfanteras dans la douleur ». Ils étaient pourtant prévenus… Si le très attendu Road Salt voit donc sa naissance retardée, les (Franco)-Suédois optent pour un EP de transition, une première chez le groupe. A l’écoute dudit objet, il semblerait qu’une innovation n’arrive jamais seule.
A chaque production, particulièrement depuis BE où la notion de concept-album a pris tout son sens, Pain of Salvation a su créer la surprise et susciter les interrogations d’un public plus ou moins prêt et préparé à suivre le charismatique Daniel Gildenlöw. Ne comptant plus les paradoxes et les propos contradictoires voire provocateurs, le leader du groupe, qui se défend toujours de correspondre aux préceptes du metal progressif, puise aujourd’hui ses sources d’inspiration quelques décennies en arrière. Se plongeant dans l’essence des seventies pour en révéler un potentiel nouveau, enrichi et sculpté par ce qui fait toute l’originalité du groupe, il nous invite aujourd’hui à partager sa nouvelle vision musicale, annoncée entre la lourdeur d’un Black Sabbath et des envolées à la Jeff Buckley.
Les indices distillés en amont sur le site du groupe se révèlent limpides lors de l’écoute des quatre titres inédits de Linoleum. Les influences citées se dessinent tandis que la mélancolie et l’aspect profondément émotionnel propres aux Scandinaves sont toujours aussi présents et prenants, ne cantonnant pas les compositions à un vague revival qui sentirait l’encens ou le patchouli. Démarrant avec le titre éponyme au refrain rapidement addictif, le ton est donné : structures plus convenues et plus brutes, délestées de soli de guitares, son travaillé à l’ancienne, et toujours un travail vocal impressionnant et troublant, certainement moins expérimental, au souci du détail manifeste.
Si donner naissance à cet avant-goût de l’album à venir fut douloureux, c’est pour contrebalancer notamment le plaisir pris par le groupe lors de la conception qui transparait ici. L’enregistrement des nouveaux titres s’est déroulé à la manière de jam sessions, à la fois plus directs, plus organiques mais également plus libres, comme l’illustre le jeu de batterie subtil du nouveau venu qui s’intègre sans faille avec talent et personnalité. Le groupe semble trouver dans cette nouvelle alchimie une force innovante tout en parvenant à toucher en plein cœur, à l’image du poignant « Gone » qui jongle brillamment avec ses facettes originelles et actuelles, et justifiera à lui seul l’achat de ce mini album.
Avec Linoleum, Pain of Salvation s’éloigne cependant davantage des premiers albums qui l’ont fait connaître, où expérimentation et noirceur faisaient flirter émotion et réflexion. Le groupe avait acquis ce statut particulier qui le rendait d’autant plus indescriptible qu’il était véritablement unique. Au risque de perdre au passage un peu de cette aura si chère aux fans de la première heure, la formation se renouvelle, encore et toujours, différente mais ô combien intéressante, et pourra définitivement séduire une cible plus large d’auditeurs sensibles à toute bonne musique.