Matthieu Thibault - Radiohead

Le printemps approche, c’est le moment de préparer ses lectures d’été ! Et quoi de mieux qu’un bon gros pavé bien addictif, à dévorer au soleil. Le Mot et Le reste vous en propose un bien beau, et ce n’est pas un roman, mais la biographie complète et détaillée de Radiohead. Avec Matthieu Thibault aux commandes, qui nous avait déjà régalé entre autres avec David Bowie – L’avant-garde pop, on peut d’avance s’attendre à quelque chose de lisible et de documenté.

Radiohead fait partie de cette minuscule catégorie de groupes qui ne sont jamais où on les attend, qui innovent sans cesse et ne peuvent exister que dans cette dynamique ; ils incarnent ainsi le vrai sens du terme « rock progressif », étiquette qu’on leur colle pourtant rarement. Quelle autre formation peut se targuer d’avoir réalisé le grand écart, avec le même talent, entre brit-pop peu académique, art-rock, minimalisme et électro ? Qui, parmi la concurrence, a survécu sur le long terme à son premier tube interplanétaire ? Où sont aujourd’hui les Oasis, Supergrass et autres Pulp ? Le groupe de Thom Yorke n’a pas cessé d’innover musicalement, mais aussi dans la distribution et la vente de ses albums, se détachant rapidement de l’influence des maisons de disque.

C’est presque 40 années d’existence qui sont racontées avec force détails dans ce volume de plus de 400 pages par Thibault, achevé après cinq années de travail, ce qui en fait la seule biographie vraiment exhaustive en français consacrée au groupe britannique et aux side-projets de ses membres, en particulier ceux de son leader. Depuis On A Friday, embryon de Radiohead né en 1986, puis Pablo Honey et son « Creep », l’énorme OK Computer jusqu’à Moon Shaped Pool et The Smile, dernier projet parallèle mené par Yorke et Greenwood, on suit le groupe et ses évolutions, ses crises, ses prises de position, mais aussi ses sessions d’enregistrement, ses apparitions médiatiques et ses tournées. Chaque titre de Radiohead et des projets parallèles de Thom Yorke est par ailleurs analysé en détail. L’auteur a traduit une partie des paroles et y apporte un éclairage précis, clarifie les thématiques et établit des rapports avec la musique et l’instrumentation, sans que cela sonne jamais abscons ou pédant. Au contraire, on redécouvre de cette manière tout ce qui fait l’inspiration de Thom Yorke, en suivant la progression, la mutation de l’individu et de ses acolytes face aux changements qui les touche, dans leur statut, dans le monde qui les entoure.

C’est sans hésitation qu’on peut qualifier l’ouvrage de bible – sans la facette prosélyte toutefois, l’auteur évitant l’écueil de la prose excessivement élogieuse – car tout y est. Le livre de Matthieu Thibault est même sans doute ce qui se fait de plus complet et de documenté sur le groupe à l’heure actuelle, y compris en anglais. Intimidant par son volume, Radiohead est pourtant d’une lecture aisée pour qui s’intéresse un tant soit peu au groupe. Monumental et indispensable !