Frost* - Day and Age

Sorti le: 16/06/2021

Par Florent Canepa

Label: Burning Shed

Site: https://frost.life/

Pouvoir se renouveler tout en possédant une identité forte : telle est la gageure pour beaucoup de groupes et encore plus de supergroupes qui ont forcément un emploi du temps plus limité pour réaliser les choses. Parlez-en à Transatlantic, tiens ! Les Anglais de Frost* réussissent pourtant à relever le défi avec une déconcertante facilité. Il faudra huit titres à Jem Godfrey, John Mitchell et leurs acolytes pour démontrer une puissance mélodique régénérée par des idées créatives foisonnantes.

Passons en effet sur le disque bonus instrumental qui, s’il ravira les fans ultimes, n’aura qu’une valeur anecdotique pour les autres et concentrons nous sur la sève de Day and Age, concept album pas trop alambiqué et qui sait manier avec maestria un rock progressif bien classique proche de Genesis (il faut dire que John Mitchell évoque toujours et même de plus en plus Peter Gabriel et son grain si reconnaissable) mais lui insuffle des pulsions électroniques savoureuses. On pense aussi parfois aussi à Yes, à leur meilleur, la fougue en plus (« Terrestrial »). Le morceau titre phare nous avait déjà emballé en guise d’apéritif mais le reste du propos tient tout autant la route, aussi bien dans son penchant très pop et accessible (« Island Life ») que dans ses morceaux fleuve où les saturations reprennent (un peu) du poil de la bête (« Kill the orchestra »). L’alternance des deux chanteurs propose toujours cette petite variation qui fait que l’on s’ennuie jamais.

Il aura fallu pas moins de trois batteurs différents pour remplacer le génial et volubile Craig Blundell. Des sessionistes chevronnés ayant officié dans des univers aussi variés que Josh Groban ou King Crimson ! Les morceaux sont construits comme de véritables fables, des contes de science-fiction et à cet égard « The Boy who stood still » est particulièrement touchant avec ses synthés vintage. Certains pourront reprocher l’aspect un peu lisse et propre qui entoure la production du groupe, mais si l’on est habitué à leur univers, Day and Age constituera une formidable nouvelle livraison, peut-être plus forte encore que Falling Satellites. Des choeurs d’opéra fantasmatiques ou cris écorchés sur « Repeat to Fade » au piano anathemesque de « Waiting for the lie » et accents stellaires de « Skywards », on est emporté par des tourbillons où justesse du propos et beauté des harmonies se conjuguent au delà du temps. Frost* a inventé le prog cosmique, qui ne connaît aucune frontière de temps et d’espace.