Magma & Le Metalik Orkestraah
21/03/2017
Olympia - Paris
Par Thierry de Haro
Photos: Thierry de Haro
Site du groupe : http://www.magmamusic.org
Setlist :
1ère Partie (Magma) : Köhntarkösz Part 1 (intro) - Kobaïa - Theusz Hamtaahk 2ème Partie (Magma et le Metalïk Orkestraah) : Ëmëhntëhtt-Ré - Ëmëhntëhtt-Ré II (Hhaï avec Didier Lockwood) - Ëmëhntëhtt-Ré III - Ëmëhntëhtt-Ré IV - Slag Tanz - Kreühn Köhrmahn iss de Hündïn (Elephants) Encore : Ehn Deïss ('Offering' cover) ‘Magma et le Metalik Orkestraah’ … les lettres rouges de la façade la plus mythique de France luisent sur le sol détrempé par une pluie incessante et froide. Pour le deuxième soir de suite, Magma investit l’Olympia, et la longue file d’attente qui s’étire vers les profondeurs sombres du boulevard des Capucines, atteste que l’évènement est considérable. D’abord, parce que Magma n’est plus venu en ces lieux depuis des lustres. Mais surtout parce que le groupe de Christian Vander se produit en compagnie d’un orchestre d’une trentaine de musiciens issu du CMDL (Centre des Musiques Didier Lockwood) : le Metalik Orkestraah. Et à entendre ceux qui étaient déjà présents la veille, l’onde de choc risque d’être une fois de plus dévastatrice !!!
Contrôles de sécurité et fouilles de circonstance sont les prérequis désormais incontournables pour accéder à un espace dédié à la musique, où les quelques 1800 places assises sont occupées. Oui, nous parlons de Magma, groupe dont les apparitions médiatiques sont aussi rares que les traces de talent dans une soirée des Victoires de la Musique, qui remplit l’Olympia deux soirs de suite … il y a dans cette constatation un côté rassurant : une partie du public qui garnit nos salles ne se contente pas d’écouter ce que les médias veulent bien lui mettre entre les oreilles ! Tous ces amateurs éclairés sont d’ailleurs bien vite récompensés par les premières notes de « Köhntarkösz Part 1 » qui résonnent dès l’ouverture du rideau : une brève introduction que les 8 musiciens présents sur scène enchaînent sur le légendaire et groovy « Kobaïa », déclenchant une vague de plaisir qui se propage parmi les travées. Une dizaine de minutes plus loin, un soleil imaginaire va illuminer de ses rayons fantômes nos pensées déjà divagatrices, en les propulsant dans une pluie de sensations, rythmées par les voix de Stella Vander, Isabelle Feuillebois et Hervé Aknin en premier plan : « Theusz Hamtaahk » vient envelopper tous nos sens, libérant nos esprits vagabonds, pour atteindre la jouissance suprême. Ce titre nous rapproche un peu plus des étoiles à chaque écoute, et durant une trentaine de minutes, transporte le public dans les sphères d’un bonheur suspendu, vers lequel il plonge avec délectation. Peut-être est-ce cela que l’on nomme ’extase’ ?
Nous sommes alors conviés à nous remettre de nos émotions, l’espace d’un quart d’heure de pause, au cours de laquelle retrouvailles entre amis s’accordent autour des premiers superlatifs élogieux. Nous ne sommes pas au bout de nos surprises. Le rideau s’ouvre à nouveau sur le Metalik Orkestraah en premier plan, la batterie de Christian Vander trônant en retrait de l’orchestre, au milieu de la scène – Christian en chef d’orchestre alors que Benoît Alziary tient les baguettes un court instant. Stella, Isabelle et Hervé posent leurs voix sur les premières mesures d’ « Ëmëhntëhtt-Ré », dont l’intégralité va être offerte à un public déjà immergé dans la relecture symphonique de l’œuvre magmaïenne, interprétée avec talent et précision par les élèves du CMDL. Et quand on parle du loup … alors que le 2ème mouvement bat son plein au rythme envoûtant de nos trois vocalistes, Didier Lockwood vient magnifier de son violon ravageur une version transcendée de « Hhaï ». Comme en 1975 sur ce « Live » , symbole éternel de la grandeur de Magma !
L’auditoire vibre de joie, amenant encore plus haut un Lockwood électrique et généreux. Certains de ses élèves sourient aux contorsions psychédéliques de leur maître, la salle est possédée par cet archet qui crépite dans la lumière bleutée d’un Olympia qui chavire, puis qui s’enfonce dans le plaisir sous les assauts d’une rythmique hypnotique. Philippe Bussonnet martèle de sa basse en fusion un lieu désormais abandonné aux pulsations d’une émotion perpétuelle et inaltérable qui va mener nos âmes jusqu’à la fin de cette suite épique. Tout le monde semble tellement heureux d’être là, il flotte sur cette salle un air de ‘zénitude’ absolue, tant pour le public qu’apparemment pour les musiciens – Christian Vander se laissant même aller à un trait d’humour, indiquant que ‘le concert ne faisait que commencer’, alors que presque deux heures se sont déjà écoulées ! Mais une chose est sûre : il n’est pas terminé et Slag Tanz vient couler dans nos veines sur une vingtaine de minutes, pénétrant dans chacune de nos cellules pour y injecter ces ondes incroyables d’un bonheur que le groupe nous envoie depuis plus de 45 ans maintenant ! Stella présente alors les musiciens sur fond de « Kreühn Köhrmahn iss de Hündïn (Elephants) », le public est debout, applaudit à tout rompre pour un dernier rappel et clame sa joie lorsque Christian Vander revient, accompagné de la section à cordes. Dans une ambiance intimiste, il entame « Ehn Deïss », un des joyaux du répertoire d’Offering, autre groupe faisant partie de ses nombreux projets. Puis est rejoint par Stella, Isabelle et Hervé pour un final épuré et somptueux.
Après une dernière ovation, le public quitte les lieux ravi d’avoir vécu un tel moment de partage. Comment, en de telles circonstances, ne pas s’empêcher de penser également à tous ces jeunes musiciens, qui auront été aussi les acteurs talentueux d’un tel évènement, s’imprégnant d’une oeuvre qui ne pourra que leur donner la clé pour aller au-delà de nouveaux horizons musicaux ? Et dont ils seront peut-être les serviteurs, puis les relais pour l’éternité : ‘A vie, à mort et après …’