Agent Fresco - Destrier
Sorti le: 14/10/2015
Par Jean-Philippe Haas
Label: SPV
Site: http://www.agentfresco.is/
Il n’y a pas foule, là-haut, dans le grand froid de l’Islande, mais proportionnellement à la population, le nombre de bons groupes au mètre carré est sacrément élevé. Sigur Rós, Sólstafir, sans oublier bien sûr Björk ne sont que quelques exemples auxquels vient s’ajouter aujourd’hui Agent Fresco. Les quatre avaient attiré l’attention en 2010 avec A Long Time Listening, ce qui leur avait permis de tourner notamment en Europe continentale. Cinq années plus tard, les voici dans l’écurie SPV, un nouveau disque sous le bras.
« Let The See Us » semble annoncer un trip-rock planant, mais dès « Dark Water », les riffs gras syncopés et les refrains-hameçons entrent en scène. La complexité sous-jacente est mise au service de l’immédiateté. La frappe très math rock de Hrafnkell Örn Guðjónsson, transparente pour l’auditeur lambda, insuffle une énergie épileptique indissociable du son des Islandais. Quant à la voix haut perchée de Arnór Dan Arnarson, autre clé de voûte du style Agent Fresco, elle évoque souvent celle de Morten Harket (dont on ne vous fera pas l’affront de citer le groupe… reformé récemment, soit dit en passant) tout en possédant ses propres intonations particulières.
Outre les compétences des musiciens, l’une des qualités principales de Destrier est d’être suffisamment contrasté pour ne pas lasser dès la seconde écoute et condamner le disque à prendre la poussière sur (ou sous) un meuble. On passe de titres emphatiques, puissants et accrocheurs (« Howls », « Pyre », « See Hell ») à des petits bijoux art-rock (« Bemoan ») plus réservés, voire atmosphériques (« Let Fall The Curtain », « Death Rattle »). Rares sont les digressions instrumentales et les débordements inutiles : les formats sont très ramassés, à partir d’une minute et demi sans jamais atteindre les cinq minutes, excepté sur le final (« Mono No Aware »), d’ailleurs un peu fourre-tout et brouillon.
A moins d’être allergique à la voix du chanteur, de la sueur coulera sous les aisselles avant que soient épuisées les ressources de cet album. Lorsque ces quatre gars auront tourné, fait la promotion et amorti Destrier comme il se doit, on espère qu’il se remettront à composer, histoire qu’on n’ait pas cinq autres années à attendre pour découvrir la suite !