The Headshakers - Tribute to Zappa
28/06/2015
Le Triton - Paris
Par Florent Simon
Photos: Florent Simon
Site du groupe : http://www.theheadshakers.com/wp/
Setlist :
Intro « scrutinizer » / Pound for a Brown / Big Swifty / My Guitar Wants to Kill Your Mama / Zomby Woof / Eat That Question / The Black Page (Teenage Version) / Let’s Make the Water Turn Black / Oh No / Black Napkins / More Trouble Every Day / Don't You Ever Wash That Thing? / Improvisation / Willy the Pimp / City of Tiny Lights / I’m the SlimeC’est avec le malin plaisir de se retrouver dans l’enceinte du Triton, et plus exactement dans la petite mais conviviale salle « n°2 », que l’équipe de Chromatique est tombée sous le charme de The Headshakers. Cette formation lilloise de dix musiciens survoltés s’est fait connaitre et reconnaitre après six années à tourner dans les grands festivals jazz français, et à sortir deux EP ainsi qu’un premier album produit l’année dernière. Les nordistes ont monté depuis 2013 un nouveau spectacle en l’honneur de Frank Zappa afin de célébrer les vingt ans de la disparition de ce grand monsieur. Depuis, ils continuent à produire ce show équilibriste où se mêlent musique de haute voltige, intermèdes humoristiques et surdose d’énergie. Et nous y étions pour vous !
C’est donc dans cette nouvelle salle à l’architecture originale où le public peut être très proche des artistes que The Headshakers nous a livré un set jouant avec le feu durant une heure trente. Il s’agit d’une formation complète incluant percussions et cuivres – instruments de rigueur pour du Zappa – parfois rejointe par un ubuesque chanteur. Et c’est bien plus qu’un Tribute band qui se dévoile à nous : ces artistes détonants et surcalibrés ont su dépasser le simple exercice de la pure reprise – maintes fois reproduit et souvent avec brio, depuis vingt ans – y apposant leur patte sur la plupart des morceaux. Jamais perdus dans la sur-technicité des œuvres ni dans la grande variété de styles abordés, ils ont su composer une set-list de choix, plaçant le curseur au centre des thématiques zappaiennes : rigueur musicale, rire, émotion, et bien sûr, politique et sexe.
Allant de « Eat That Question » à « Willy the Pimp » en passant par « The Black Page », l’intégralité des reprises sont parfaitement restituées en reprenant certaines versions à la note près. Nous retrouvons ainsi par exemple le « Big Swifty » de 1988 incluant des extraits de Bizet et Tchaikovsky, ou encore le « More Trouble Everyday » évoquant la tournée 1974. Cependant, ils y instillent quelques surprises comme des improvisations, des paroles en français ou encore un rap sur «« I’m the Slime », appuyant l’originalité et la modernité des œuvres. De plus, les morceaux joués (majoritairement instrumentaux) sont parmi les plus marquants et font écho aux meilleures tournées du maitre (celles de 1974 et 1988 notamment), formant une set-list enflammée, cohérente et sans faille.
Chaque musicien est parfait dans son rôle. Les cuivres remplissent l’atmosphère d’une teinte funky, tandis que Mike Varlet est tout simplement un guitariste énorme. Impressionnant de maîtrise, son talent lui permet de rendre hommage aux soli originaux tout en les marquant de sa couleur. Le chanteur Gino Ceccarelli quant à lui, est un personnage haut en couleur avec son costume du dimanche et sa voix aérienne rappelant Bobby Martin. Le saxophoniste Pierre-Yves Langlois aime à s’approprier les gestes du maestro Zappa afin de conduire le groupe. Percussionniste, claviériste, batteur et bassiste complètent cette folle équipe alignée en deux rangées sur cette scène exiguë, nous éclaboussant de notes grâce à leur doigts magiques.
Pour résumer la prestation de cette soirée, l’on pourra donc se souvenir des marques fortes du groupe que sont la technicité et la générosité, la dérision et improvisation, l’échange avec le public, bref tous ces ingrédients que cette armée funkadélique sert à merveille. Le pari de reconstituer toute l’ambiance groovy loufoque chère au célèbre moustachu est plus que tenu, et cela démontre aussi que cette musique est toujours aussi vivante, charmeuse, exigeante et énergique depuis quarante ans. Aussi accessible pour les novices que pointu pour les fans, le show des Headshakers est immanquable. Le jazz et le funk ne sont pas morts, ils sentent toujours bizarre…ment bons !
Exclusivité mondiale Impossible de ne pas vous partager cette information avec l’autorisation du groupe ! Les Headshakers ont récemment reçu les louanges de la part de Napoleon Murphy Brock, qui n’est autre que le mythique chanteur/saxophoniste des Mother Of Invention de 1974 à 1975 qui marqua quelques albums cultes de sa voix rauque et son rire communicateur. C’est grâce à une reprise de Zomby Woof postée sur internet que le musicien a récemment débarqué spécialement des Amériques pour jouer avec eux un concert exceptionnel, après quelques jours de répétitions. Et l’histoire ne s’arrêtera pas là puisque le coup de foudre est si fort qu’une collaboration est prévue afin de reprendre les routes de la tournée européenne de 1974 des Mothers et d’interpréter en intégralité l’album live Roxy & Elsewhere, sous le sobriquet « The best Cover Band You Never Heard in Your Life » en écho à un célèbre titre d’album. Affaire à suivre !