S.O.S. - Looking For The Next One
Sorti le: 07/04/2014
Par Aleksandr Lézy
Label: Cuneiform Records
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Si l’acronyme de ce blase fait immédiatement référence à l’appel au secours, c’est qu’il y a peut-être une raison. En vérité je vous le dis, S.O.S est le fruit du péché, ou plutôt de l’étroite collaboration entre John Surnam, Mike Osborne et Alan Skidmore, trois saxophonistes réputés sur la scène jazz britannique au début des années soixante-dix. Le trio n’ayant qu’une brève existence de trois années et un unique album au compteur, ce Looking For The Next One représente à lui seul plus que tout ce qui n’est jamais apparu aux oreilles du public.
Composé de deux disques, cette archive proposée encore une fois par l’irréductible label américain Cuneiform met en exergue d’un côté le travail caché de sessions d’enregistrements de l’époque et de l’autre un concert entier datant de juillet 1974 au festival de Jazz de Balver Höhle situé en Allemagne.
Le premier cd inonde les esgourdes de saxophone à n’en plus pouvoir. La richesse et l’abondance entraînent une douloureuse indigestion. Pourtant, il faut reconnaître à ses six pistes étirées la particularité d’être justement particulières. Trois saxophones qui se répondent dans des échanges abrupts, parfois forcés n’est pas chose commune et l’impression de grande capacité instrumentale interpelle indéniablement. On ne peut tout de même pas demander à des faces B de tenir le rôle de pièces maîtresses …
Quant au deuxième cd, c’est l’excellente surprise de ces archives. Ce concert entier fait à lui seul tout l’intérêt de l’objet accompagné par un livret de seize pages très bien documenté. Deux longs morceaux exigeants et envoûtants d’environ vingt-cinq minutes chacun se taillent la part belle. Dans un esprit Miles Davis à la Bitches Brew (1969), le trio fait montre de grande élégance et de talent aussi, grâce aux sons électroniques produits par des synthétiseurs et à quelques échanges d’instruments contre de la batterie ou du piano : vive les multi-instrumentistes ! Bien que les morceaux se suffisent déjà largement à eux-mêmes, se rajoute un titre d’une quinzaine de minutes esprit Canterbury free jazz très bien construit et un tout petit rappel probablement improvisé comme tout le reste.
La musique improvisée peut avoir ses faiblesses, le jazz aussi, mais lorsqu’elle apparaît sous forme différente de celle que l’on connaît d’habitude, avec la coutume d’avoir de la batterie, de la (contre)basse et de la guitare, il peut s’avérer fort à propos d’unir les forces d’un instrument, en l’occurrence le saxophone pour, en fanfare, lui insuffler l’énergie nécessaire à l’élaboration de nouveauté. Avec un enregistrement de qualité, voici un bien bel objet/document qu’il faut prendre avec délicatesse et ouverture d’esprit, pour ne pas tomber bêtement à côté.