Thank You Scientist - Maps of Non-Existent Places
Sorti le: 02/12/2012
Par Jean-Philippe Haas
Label: Autoproduction
Site: www.thankyouscientist.net
Quel plaisir de pouvoir dire encore, de temps en temps : « Wow, d’où sortent-ils, ceux-là ? » ! Et de se surprendre à faire des bonds désordonnés dans une folle chorégraphie d’air guitar. Ces jeunes musiciens au talent insolent se nomment Thank You Scientist et mêlent avec une énervante aisance les aspects les plus immédiats du metal alternatif et les composantes les plus savantes de son petit frère progressif. Quand Protest The Hero rencontre Captain Squeegee…
Qu’on ne se laisse pas abuser par l’introduction chorale façon boys band de gospel, ni par « A Salesman’s Guide to Nonexistence » qui pourrait annoncer une suite de tubes ultra-mélodiques, concis et survoltés. Si les plus perspicaces auront déjà détecté dans ce titre l’extraordinaire habileté des musiciens et les arrangements subtils où viennent se glisser cuivres et cordes, les plus sceptiques se décrisperont dès « Feed The Horses », et prendront sans doute toute la mesure de ce qui se trame sur Maps of Non-Existent Places : la naissance d’un vrai groupe original qui ose afficher sa dextérité et son sens de la mélodie « facile », tout en caressant funk et jazz dans le sens du poil. L’impressionnant « Blood On The Radio » ne fait que confirmer cette témérité en assommant l’auditeur avec ses neuf minutes d’un brassage énergique et totalement maîtrisé de genres. Histoire de prouver que le gros son peut (presque) être mis de côté parfois, l’instrumental « Suspicious Waveforms » éclaire l’autre composante de Thank You Scientist en mettant à l’honneur le saxophone, la trompette et le violon à la fois sur des grooves veloutés et des passages fusion. On en vient à regretter l’absence de réels temps morts qui auraient permis de mieux apprécier la densité sonore de ce jubilatoire tintamarre, mais après un tel maelstrom, on pardonnera d’autant plus facilement la présence de quelques titres un peu moins barrés (« Absentee », « Concrete Swan Dive », « My Famed Disappearing Act »). Par ailleurs, la performance peu nuancée de Salvatore Marrano pourra insupporter ceux qui pensent qu’un groupe dégainant de grosses guitares doit disposer d’un chanteur braillard et patibulaire, et non d’une voix emo un brin maniérée.
Il est difficile de savoir quelle sera la durée de vie de cet album, mais il est certain que son impact immédiat en étourdira plus d’un. Quel que soit le regard porté sur ce disque, il est rassurant de constater que des jeunes gens, tout en utilisant les codes modernes, ont encore envie de pratiquer autre chose qu’une muzak simpliste uniquement destinée au marché. Souhaitons que leur enthousiasme ne soit pas noyé sous le flot incessant de la médiocrité et l’indifférence des faiseurs d’argent.