Saga - 20/20

Sorti le: 20/08/2012

Par Florent Canepa

Label: Edel

Site: www.sagaontour.ca

Saga a traversé les époques, tel un vaisseau traçant sa route stellaire, faisant fi des modes et des appétits éphémères. Les quelques évolutions humaines de la formation n’ont pas fait dévier d’un iota le credo rock progressif mélodique et définitivement rêveur, juché sur une histoire qui a démarré en 1977. Mais, attention, sonnez tambours et trompettes, aujourd’hui est un jour de fête qui voit aussi le retour en troupe de Michael Sadler, chanteur cardinal et originel du quintet. Autant le dire tout de suite : c’est l’euphorique cadeau de ce déjà vingtième album. On en oublie le remplacement du batteur non historique Brian Doerner par un nouveau, Mike Thorne.

Comme un pied de nez au temps qui passe, les anciens font peau neuve, ou plutôt revêtent des habits qu’ils ont toujours choisis, mais sans effort et avec une rejuvenation troublante. Comme cette opération des yeux qu’a subi le claviériste Jim Gilmour et qui donne à l’album son titre et sa pochette. La recette est toujours aussi simple quand les riffs s’installent sereinement et que ça et là se lovent les soli de Ian Critchton (« Spin it again »). Même quand la messe est dite, de petites distortions harmoniques rassurent sur le potentiel du groupe à s’éloigner des rengaines trop proprettes (« Anywhere you wanna go »). Parfois, on le confesse, on tangue comme sur « Another day out of sight » et sa montée symphonique qui crachouille. Ou encore sur le titre de clôture, mélangeant claviers percussifs éprouvants et guitares mal fagotées. Tout se régule pourtant dans le feu des ballades léchées, à l’heure où les guitares acoustiques éblouissent les oreilles (« Lost for words »).

Non, il ne faudra pas espérer une once de modernité ici, mais une production vintage manucurée, jusque dans les réverbes de batterie et le surmixage alternatif de la basse. A l’écoute de « One of these days » et son air de new wave déglinguée, on est pourtant moins convenable (moins bien fini ?) que sur d’anciennes productions des Canadiens. Seul un morceau dépassera les six minutes : Saga a toujours souhaité être concis et offrir un versant plus pop, face à certains de ses confrères tels Yes et Marillion, ayant une notion du temps plus élastique. Oublié Rob Morratti, Saga explose avec l’ardeur des premières heures, celles qui les ont vus démarrer ou même relancer la machine comme sur The security of illusion, aberration FM jouissive en période grunge. Vingt albums. Quelques rides du passé. Mais une mine ravissante !