Pain of Salvation & Opeth
01/12/2011
Le Bataclan - Paris
Par Maxime Delorme
Photos: Marjorie Coulin
Site du groupe : www.painofsalvation.com / www.opeth.com
Setlist :
Pain of Salvation : Softly She Cries / Ashes / Conditioned / 1979 / To the Shoreline / Kingdom of Loss / Linoleum // No Way
Opeth : The Devil’s Orchard / I Feel the Dark / Face of Melinda / Porcelain Heart / Nepenthe / The Throat of Winter / Credence / Closure / Slither / A Fair Judgement / Hex Omega // Folklore
Avec la participation de Martial Briclot
Voilà un concert qu’aucun amateur de musique progressive des années 2000 ne pouvait rater ! Opeth et Pain of Salvation partageant la même scène pour près de trois heures de musique pendant lesquelles les deux formations nous présentent leurs derniers albums, respectivement Road Salt II et Heritage. Retour sur une soirée aux doux airs de Suède.
C’est une introduction digne d’un Hellfest qui nous attend, puisque la queue à l’extérieur de la salle en est encore à déborder jusqu’au coin du pâté de maisons quand Pain of Salvation investit la scène. La salle, déjà bondée, résonne aux premières notes d’un set quasi-exclusivement réservé au concept Road Salt alors que le Pain of Salvation que nous connaissons depuis maintenant trois ans se présente à nous.
S’il est désormais officiel que deux membres émérites du groupe quittent le navire (Johan Hallgren à la guitare et Fredrik Hermansson aux claviers), leur départ imminent ne transparaît pas dans le jeu de scène, fort énergique comme à son habitude. Daniel Gildenlöw tient ses promesses en offrant un show particulièrement dynamique sur une scène d’autant plus exiguë que le matériel d’Opeth, déjà présent, occupe une place non négligeable. Par ailleurs, la mégalomanie du meneur s’affiche plus que jamais, notamment par la présence d’un poster géant de… Daniel Gildenlöw. On pourra se demander où sont les autres membres… on pourra les chercher… et on ne les trouvera pas.
La part du public ayant assisté au précédent passage de Pain of Salvation dans la capitale aura eu l’occasion de s’émerveiller sur l’excellente qualité du son ! L’acoustique remarquable du Bataclan appuie en effet toutes les subtilités de composition et aucun instrument n’est laissé à la traîne, ni pour ce set, ni pour le suivant. Cette clarté et cette précision renforcent d’autant plus les petits défauts de jeu (couac) dont les Suédois ont l’habitude de parsemer leurs concerts.
Du point de vue musical, pour un premier passage en France après la sortie de Road Salt II il faut avouer que les morceaux font leur effet et que le concept dégage une ambiance certaine, au doux parfum vintage des années soixante-dix. Seuls deux titres sortent des sentiers tracés de la « route » : le grand classique « Ashes » et un « Kingdom of Loss » toujours aussi jouissif en live au cours duquel Daniel Gildenlöw en profite pour se défouler verbalement. Les morceaux de Road Salt quant à eux sont intéressants mais ne soulèvent pas l’émoi, probablement par manque d’identité forte. On y retrouve la patte de Pain of Salvation, mais le tout sonne malheureusement un poil décevant quand on connaît les sommets qu’a pu atteindre la formation quelques années auparavant.
Malheureusement, malgré tous les efforts de la troupe, l’atmosphère ne parvient pas à se réchauffer, probablement en partie à cause du flux incessant de personnes continuant à rentrer dans la salle jusqu’à la fin du set … probablement aussi parce qu’une majorité du public est incontestablement venue voir Opeth. Alors que le concert se termine sur « No Way » (quand le public retient son souffle en attendant le « Perfect Element » coutumier), Gildenlöw annonce le retour du groupe sur les planches françaises en février. L’occasion de voir un concert un peu plus consistant face à un public dédié et avec un nouveau line-up.
Après une interruption, c’est à Opeth de prendre place sur la scène pour un set, au grand dam des puristes, sans hurlement de quelque sorte que ce soit ! L’introduction aux accents orientaux débouche directement sur « The Devil’s Orchard » et efface tous les doutes : les compositions du dernier album Heritage n’ont aucun mal à rendre parfaitement sur scène. On peut noter un effort d’adaptation du répertoire de façon à ce qu’elles bénéficient d’un son plus « moderne » et consistant que sur album.
Le set offre donc des morceaux calmes rarement joués en concert, nous prouvant qu’Opeth est aussi capable de faire un show sans servir les éternels « Drapery Falls » et autres « Grand Conjuration ». Une véritable bouffée d’air frais pour les spectateurs assidus de la formation suédoise qui auront eu l’occasion de découvrir certains titres moins joués sur scène (« Credence »), voire jamais (« The Throat of Winter », que le groupe a composé pour le jeu vidéo God of War III). Autre surprise : un solo de batterie particulièrement malvenu, ravageant le milieu de « Porcelain Heart » pour un apport des plus questionnables. Mis à part ce solo et un petit déraillement de claviers sur « Nepenthe », la musique est d’une qualité irréprochable, tant par la clarté du son, que par la précision des exécutants.
Åkerfeldt, comme à son habitude est en grande forme et fait fuser ses sempiternelles galéjades à chaque pause, réchauffant par ailleurs l’ambiance jusqu’à une température plus courante au Bataclan : la fournaise. On apprend ainsi que Martin Mendez aime les crèmes brûlées, que Martin Axenrot vient du village le plus déprimant de Suède, ou encore l’existence d’un lien étrange rapprochant Fredrik Åkesson du groupe Europe. Par ailleurs, les Suédois qui ont pour habitude d’être particulièrement statiques, se lâcheront bien plus sur les morceaux « rock’n roll », nous gratifiant de quelques sauts par-ci, par là et de traversées de scène en courant. On est loin du niveau d’énergie de Pain of Salvation, mais l’effort est cependant notable !
Malgré la qualité époustouflante du concert, un public divisé se vide sur le boulevard Voltaire. Les débats font rage (et encore maintenant sur de nombreux forums) entre les détracteurs d’Heritage, regrettant l’Opeth du growl, du metal, et ceux appréciant le changement d’air. Il est cependant très difficile de juger sur un seul concert et il faudra attendre un prochain passage pour établir précisément si la formation compte abandonner définitivement les hurlements. Saluons tout de même l’initiative et la prise de risque, plus que rares à l’heure actuelle, et prions pour qu’elle ne desserve pas le groupe.