Unexpect - Fables of the Sleepless Empire
Sorti le: 27/09/2011
Par Jean-Philippe Haas
Label: Autoproduction
Site: www.unexpect.com
On aurait pu penser qu’après l’insane In A Flesh Aquarium, Unexpect avait succombé à la folie et passé ces cinq dernières années dans un asile psychiatrique sous haute surveillance. Il n’en est rien, bien au contraire. Alors qu’ils donnaient des concerts dans le monde entier, et en particulier avec la tournée Progressive Nation, le déséquilibre mental des Québécois n’a fait que s’accroître au fur et à mesure qu’ils composaient Fables of the Sleepless Empire, nouveau témoin de leurs délires métallo-hystériques.
Le reproche qu’on pouvait formuler à l’encontre de son prédécesseur concernait la trop grande densité des compositions, alliée à une production pas tout à fait appropriée à cette débauche d’idées. Grâce à un son en nette amélioration, un mixage équilibré et des arrangements plus fins, les onze titres se font beaucoup plus lisibles, bien que demeurant d’une redoutable complexité. « Unsolved Ideas Of A Distorted Guest » coupe immédiatement les jambes du métalleux moyen : des beuglements virils, des chœurs et le chant délicat de la séraphique Leïlindel se partagent la vedette sur sept minutes de metal brutal et technique aux changements déroutants, auquel se mêlent des passages folks animés par un violon et une guitare acoustique.
Très vite se dégagent des constantes sonores où les neuf cordes de la basse du dénommé Chaoth et le violon de Borboën jouent un rôle prépondérant. Sorte de Diablo Swing Orchestra poussé à l’extrême, Unexpect ne dédaigne pas les riffs de guitare efficaces et graisseux censés remettre tout le monde d’accord après un passage particulièrement ardu. « Unfed Pendulum » résume à lui seul cette duplicité, cette allégresse feinte toujours teintée de noirceur et qui n’offre guère de repos, si ce n’est sur les trop brefs « In The Mind Of The Last Whale » et « A Fading Stance ». Très réfléchi, bien loin d’une simple démonstration de virtuosité, l’œuvre ne mérite pas de rester à l’étroit sur son disque. Vivre l’expérience scénique dans la fournaise d’une salle de concert devient dès lors un complément nécessaire à l’immatérialité de l’écoute passive.
A défaut de pouvoir saisir immédiatement les incessantes variations et autres passages du coq à l’âne, on ne s’ennuie donc jamais sur Fables of the Sleepless Empire. Estourbi par une surdose d’ingéniosité et laissé pantelant de fatigue après de telles sollicitations, on ne pourra espérer dompter cette bête récalcitrante qu’après de nombreuses écoutes. De quoi patienter jusqu’au concert.