Laurent de Wilde – Laurent de Wilde

ENTRETIEN : LAURENT DE WILDE

  Origine : France
Style : jazz informatisé
Composition :
Laurent de Wilde – piano
Otisto 23 – PC
Dernier album : PC Pieces (2007)

C’est avec quelques mois de retard sur la sortie du disque, mais armé d’une grande curiosité vis-à-vis d’une démarche originale que Progressia est allé rencontrer Laurent de Wilde, dans son antre musicale, l’ancien garage d’une maison parisienne transformé en véritable studio de travail entre un piano, un Fender Rhodes, une batterie et une multitude de percussions et de câbles en tous genres.

Progressia : La démarche de PC Pieces est pour le moins originale : peux-tu l’expliquer en quelques mots ?
Laurent de Wilde :
C’est un vieux rêve que je comptais au départ réaliser en solo. Je ne voulais pas me contenter d’utiliser le clavier du piano, mais aussi me servir de toutes les autres parties résonnantes de l’instrument, en me glissant dans toutes les voies explorées depuis une centaine d’années par le piano contemporain, et en manipulant cette source sonore avec un ordinateur pour construire de la musique en direct, en live. J’ai rapidement vu les limites de l’exercice : il était impossible de tout faire seul. J’en ai alors parlé à Otisto 23 (connu à l’Etat-civil sous le nom de Dominique Poutet) avec qui je travaillais à l’époque sur un autre projet pour lequel il était ingénieur du son. Il me parlait de son travail de performer musical, j’évoquais les difficultés que je rencontrais sur le projet PC Pieces, il me conseillait, etc. Très rapidement, il nous est apparu qu’il fallait mener ce projet à deux. Nous avons travaillé selon deux règles de base : tous les sons doivent provenir du piano et être enregistrés en direct. L’ordinateur ne fait pas de playback d’échantillons enregistrés auparavant : il aspire comme une éponge tout le liquide sonore que le piano balance par sceaux entiers, le sélectionne, le coupe, le boucle, le traite, le renvoie, etc. Très rapidement s’instaure un dialogue entre ce que je lui envoie du piano et ce qu’il me renvoie. On construit la musique en avançant comme ça, avec une « respiration » electro sur des cycles assez longs, avec une composition en strates.

Tous les sons présents sur le disque proviennent du piano. Comment as-tu alors procédé ? En utilisant des objets, par exemple ?
Les mains nues, des baguettes, de la pâte adhésive, des tickets de métro, un oeuf, une gomme… (Laurent réfléchit)

Rassure-nous : un oeuf dur ? (rires)
Oui, nous avons fait attention, quand même (rires). Surtout que nous avons travaillé avec ce piano (NdlR : il désigne le demi-queue présent dans la pièce, visible sur les photos), qui est une grand-mère vénérable de cent trois ans avec une somptueuse table d’harmonie, même si le meuble lui-même a souffert.

Tout s’est donc passé chez toi : Otisto est venu avec son matériel et vous avez travaillé sur place ?
Exactement ! PC Pieces est une véritable home production. Ce qui est très agréable car nous avons pu travailler à notre rythme aux heures qu’on voulait. Le travail s’est déroulé en plusieurs étapes puisque tout le processus a duré deux ans et demi. On se voyait régulièrement, on prenait une semaine à dix jours pour essayer des choses différentes. Nous avons pas mal travaillé en fonction des concerts : lorsqu’on avait une date, on se voyait quelques temps avant, pour voir à quoi l’on pouvait aboutir. Une fois que nous nous sommes estimés prêts, nous avons tout enregistré en une semaine.

Il y a donc eu une phase de composition puis une phase d’enregistrement séparée ?
La première phase n’était pas vraiment une phase d’écriture, c’était plutôt un moment de recherche musicale et technique, pour nous approprier l’instrumentation que nous étions en train de développer, voir quels étaient les outils dont nous disposions et comment communiquer l’un avec l’autre. Je l’explique dans le livret du disque : dans un premier temps, j’abordais le projet de façon très compositionnelle, je donnais des ordres à l’ordinateur et je disais à Otisto : « On va répéter ça deux fois, puis on va passer à ça, etc. » : tout était écrit dans ma tête. Et en fait… ça ne marche pas du tout ! Le pauvre Otisto galopait derrière moi, et ça n’avait pas de consistance, c’était vraiment une vue de mon esprit. Nous sommes ensuite entrés dans une phase exactement inverse pendant laquelle nous passions des journées entières à essayer toutes sortes de choses. Cela a duré très longtemps. Je tournais autour du piano, à tester toutes sortes d’objets, à différents endroits, à gratouiller, etc. Pendant ce temps-là, Otisto essayait des effets : imperturbable, il me disait : « Vas-y, envoie plutôt ci ou ça » et c’est en fonction de ce que je lui envoyais qu’il pouvait réagir, dans tel ou tel sens. Nous nous sommes donc constitué de façon très désordonnée une espèce de sac à « trucs ». C’était indispensable car la difficulté dans ce genre d’exercices est de trouver tout de suite le traitement qui convient, avec les bons paramètres. Cela demande du temps : il est donc exclu de le faire en live, il faut savoir avant où l’on va. Et même lorsque l’on travaille en studio et qu’on a tout le temps du monde, s’arrêter pendant de longues minutes ou de longues heures pour paramétrer l’ordinateur, ça handicape le flux créatif. A partir du moment où nous avons su tout de suite comment utiliser les outils, nous avons commencé à sentir quelque chose monter et avons pu nous dire : « C’est bon, la prochaine fois, on enregistre ». Nous avons ensuite composé et enregistré dans la foulée. Nous commencions la journée sans aucune idée préconçue. Je me mettais à jouer deux-trois choses, Otisto y repérait ce qui lui convenait et c’était parti. On enregistrait tout ce qui venait, dans les conditions du direct : nous faisions tourner une celulle, sur laquelle Otisto travaillait un peu, puis quand j’étais satisfait, je proposais une autre partie. Nous avons avancé comme cela, pas à pas.

Le travail est-il aussi passé par de longues discussions préalables entre les répétitions ou enregistrements ?
Nous sommes tous les deux très bavards ! (rires) Il y a eu beaucoup de discussions, mais pas de divergences de point de vue. Otisto est vraiment un instrumentiste exceptionnel de grande classe. Ce qu’il fait est à la fois une performance remarquable et une revendication artistique très originale. Il a une oreille très sûre, c’est un ancien pianiste et je profite énormément de son expérience. Le travail qu’il produit est pour moi miraculeux. Il m’aurait fallu des années pour venir à bout de ce qu’il a accompli en quelques mois. Je pense qu’il a le même respect vis-à-vis de moi. Le fait que je lui fournisse le matériau musical, les compositions, lui convient très bien, et il me répète très souvent qu’il est très heureux de notre travail. Nous nous sommes plus consacrés à nous nourrir l’un de l’autre qu’à discuter des orientations à prendre.

Est-ce un projet durable ou s’agissait-il juste d’une collaboration ponctuelle ?
J’espère que ça va durer dix ans ! Pour être franc, nous avons passé beaucoup de temps à inventer une instrumentation et très peu à composer la musique et à l’enregistrer. Nous en sommes pour l’instant restés aux premiers éléments qui nous venaient à l’esprit et issus de nos bagages respectifs. Plus on fera de concerts, de résidences, de séances de travail à la maison, plus on s’approchera – du moins je l’espère – d’un langage spécifique à cette instrumentation. J’espère que ce projet durera longtemps. Je ne sais pas si nous ferons un autre album, ni même si le disque existera encore quand nous voudrons le faire, mais une chose est sûre, c’est que nous déployons beaucoup d’efforts pour essayer de faire tourner la formation avec la vidéo. De plus, Otisto est associé à DTC Records, une structure de production qui fait beaucoup de choses et dispose d’un réseau associatif très actif.

Tu disais tout à l’heure qu’au début de votre travail, tu pensais essentiellement les structures, sans doute du fait de ton expérience jazz. A priori, le jazz est une musique assez structurée, avec des cellules de tant de mesures, alors que les musiques électroniques se construisent par strates de manière beaucoup plus linéaire. Comment avez-vous fait converger ces deux approches ?
Tout s’est fait en coulant le piano dans l’ordinateur, c’est-à-dire en ne perdant jamais de vue que le service de la musique était à rendre à l’électronique. Il reste un côté très jazz dans la mesure où l’on ne fait jamais deux fois la même chose, que ça n’arrête pas de changer. Je sais, ce n’est pas très électronique ! (rires) Mais nous sommes du genre à nous ennuyer assez vite et il y en a toujours un des deux qui a envie de tripoter un peu les boutons ! Selon moi, cet album n’est pas du jazz, même si c’est de là que je viens tout comme Otisto, puisque c’est en essayant de devenir pianiste de jazz qu’il s’est finalement dit qu’il ne serait pas pianiste.

Les compositions en elles-mêmes ne sonnent pas comme du jazz, mais il y a une ambiance générale qui s’en rapproche, sans doute un certain aspect « organique »…
Je suis assez mal placé pour en juger. Il me semble que c’est plutôt quelque chose de majoritairement électronique. Cela dit, sur cette question de l’aspect organique, vous avez certainement raison et ça ne me déplait pas du tout (rires) !

Passons à la transposition scénique du travail effectué sur PC Pieces. L’avez-vous déjà beaucoup joué sur scène ?
Nous avons déjà donné une dizaine de concerts.

Quel type de public vient vous voir ? Et comment réagit-il ?
(Hésitation) Personnellement, je n’ai pas du tout l’habitude de faire ce genre de musique et donc d’avoir ce genre de public. J’ai toujours fait, en jazz comme en électro, des choses assez « pêchues », où tu sens le public réagir ; ce sont des moments que j’aime. Et là, on fait quelque chose de très doux, de très progressif, avec un public assis et attentif. Cette musique reste très minimaliste, très contrôlée, on ne sue jamais à grosses gouttes. C’est une expérience assez nouvelle. Et je dois dire que je suis étonné que le public reste jusqu’à la fin ! (rires) Visiblement, ça se passe bien ! Je pense que la vidéo aide beaucoup à cela. Il y a des caméras sur pieds qui nous filment sous différents angles, ainsi qu’une steadycam qui peut venir capturer mes manipulations à l’intérieur du piano. En régie, Cédric Delport mixe les images venues des caméras et d’autres qu’il ajoute. En général, la vidéo sur de la musique fait qu’assez rapidement, les yeux se fixent sur l’écran et on ne voit plus ce qui se passe sur scène, comme si elle était presque triviale. Là, le propos est inversé puisque ce que l’on voit sur l’écran ramène à ce qui se passe sur scène. On a l’impression que l’image est une prolongation de ce qui s’y passe, sans être pour autant didactique ou bêtement illustrative.

Quand on parle de vidéo projetée sur de la musique, on en vient toujours à une petite pointe de provocation. Pourquoi faut-il des images ? La musique ne se suffit-elle pas à elle-même ?
En l’occurrence, je fabrique beaucoup de choses à l’intérieur du piano, à un endroit où ce n’est pas très visible pour le public, et l’ordinateur, ce n’est pas vraiment très sexy. Même si Otisto se concentre entre son ordinateur et ses petites mixettes, et qu’il est assez beau à voir lorsqu’il joue, cela ne suffit pas visuellement ! La vidéo ajoute donc une dimension supplémentaire, tout en élargissant la vision de la création musicale en train de se produire. Nous avons vu des prises de vue de l’ensemble, car on ne peut pas tout appréhender lorsqu’on joue et nous nous sommes rendu compte qu’effectivement, c’est très agréable à regarder, justement parce que nous sommes dans la complémentarité et non dans l’illustration.

Au niveau musical sur scène, quelle est la part d’interaction possible lorsqu’on inclut l’informatique ? Le jazz, ce sont des musiciens qui jouent ensemble et réagissent les uns par rapport aux autres, c’est un format très libre. L’introduction des machines laisse-t-elle autant de réactivité et d’interactivité ?
Autant en valeur brute, je dirais que oui. Simplement, il faut trouver les nouveaux chemins d’une nouvelle réactivité. Dans notre cas, ça commence à venir et c’est là que ça devient vraiment amusant. Encore une fois, je n’ai pas l’impression de faire du jazz dans le cadre de ce projet, mais effectivement, les points essentiels sont là : une musique assez structurée, un partage entre les musiciens, la circulation d’un flux d’énergie et le fait qu’on ne joue jamais deux fois la même chose. C’est donc aussi réactif qu’un groupe plus traditionnel. Mais comme le jazz existe depuis cent ans maintenant, l’interactivité est assez rodée avec l’instrumentation « habituelle ». Donc, peut-être que d’ici une centaine d’années, on devrait y arriver aussi avec l’informatique !

Entre le travail fait sur cet album et ce que tu avais fait sur Organics, l’incorporation des machines et de l’électronique a-t-elle transformé ta manière de penser la musique, de l’écrire et de l’écouter ?
Je n’ai pas tout changé, mais il a bien sûr fallu aborder les choses autrement ! La musique électronique, c’est au moins autant le point de vue de l’ingénieur du son que du musicien. On a vu débouler sur la scène des flopées de gens qui ne savaient pas distinguer le ré du sol et qui arrivaient quand même à créer des trucs monstrueux, parce qu’ils entendaient le son et pas les notes. Je viens d’une tradition où l’on pense « note ». Auparavant, lorsque j’étais en studio et que j’enregistrais du jazz acoustique, je n’avais pas la moindre idée de ce qui se passait du côté de la console. Je voyais vaguement des gars placer des micros, mais ça ne m’intéressait pas, je me concentrais sur ce que je jouais. J’ai réalisé en me tournant vers la musique électronique que le point de vue de l’autre côté de la vitre comptait en fait énormément. En fait, ça change tout.

J’imagine du coup que maintenant, même dans ton travail acoustique, tu ne pourras plus refaire un disque de la même manière, tu seras sans doute forcément influencé par cette nouvelle approche.
Le premier répertoire envisagé pour PC Pieces, celui où Otisto galopait derrière moi et que nous avons abandonné lorsque nous nous sommes aperçus que cela ne pouvait pas fonctionner de cette manière, je l’ai réutilisé pour mon trio. C’est peut-être un peu schizophrène, mais j’adore avoir le trio acoustique qui continue de tourner d’un côté et ce projet électronique de l’autre. Pour moi, ce sont deux types de plaisirs différents.

Est-ce le même public qui te suit dans ces deux voies ou as-tu remarqué des publics différents ?
C’est encore un peu tôt pour le savoir. Cela dit, je suis toujours surpris par la chaleur de la réaction des gens au projet PC Pieces. Ils rentrent vraiment dans la démarche, comprennent ce que nous faisons, cela n’est pas perçu comme une musique de façade. On se sent en fait très accompagné. Il nous est d’ailleurs arrivé un gag amusant lors d’un showcase dans un grand magasin de disques. Sur scène, Otisto et moi avons des casques, parce que nous n’entendons pas forcément la même chose que ce qui passe en façade. On commence à jouer, on tâtonne un peu, on se lance sur quelque chose, on s’installe un peu dans la musique, ça part bien, et au bout de quelques quatre minutes, on voit le public qui commence à s’agiter un peu. Puis finalement une femme s’écrie : « On entend rien ! » (rires). En fait, la carte son avait coupé la sortie en façade. Du coup, dans nos casques, tout allait bien, on était dedans et les gens, pendant quatre minutes, attendaient que ça commence. Ça montre quand même que pendant quatre minutes, on peut tenir le public en attente, avec une simple promesse de musique ! (rires)

Vous portez donc un casque sur scène, ça ne vous coupe pas de la salle ?
Non, parce que ce n’est pas un casque qui isole complètement. Et ce n’est finalement pas plus mal d’être coupés parfois, ça permet de rester concentrer.

Vous créez donc une sorte de bulle autour de vous…
Scéniquement, l’ordinateur est vraiment contre le piano : l’esprit général est donc bien celui d’une petite bulle très fragile. Et ce d’autant plus qu’on ne peut pas jouer n’importe où. Il faut que le lieu ne soit pas sonore car tout est capté par les micros et passe dans l’ordinateur. De temps en temps, il arrive qu’un spectateur fasse un bruit : cela passe immédiatement sur l’échantillon ! C’est donc un équilibre très fragile. On est en train d’essayer de trouver un système pour éviter cela, je dois essayer de nouveaux micros très spéciaux la semaine prochaine mais le principe reste que c’est un son acoustique qui doit sortir du piano et capté par les micros. Cela va jusqu’à la diffusion en façade de ce qui sort de l’ordinateur : si elle est trop forte, elle est elle aussi captée par les micros.

Quel logiciel utilisez-vous ?
Nous utilisons Live qui permet de produire énormément de choses. Sans ce logiciel et les progrès informatiques, la vitesse exponentielle des processeurs, l’augmentation des capacités mémoire, ce projet n’aurait même pas pu voir le jour. Cela fait trois ans que nous sommes dessus. Au début, on suait à grosses gouttes et rien ne marchait. Et pourtant, on travaillait déjà avec ce logiciel. Cela n’a été rendu possible qu’avec les technologies les plus récentes et les derniers updates. En gros, si les choses en étaient restées à la situation d’il y a trois ans, ce projet n’aurait pas pu voir le jour, à moins d’avoir d’énormes machines à laver en guise d’ordinateur !

Potentiellement, votre projet peut donc encore changer du tout au tout en fonction des évolutions techniques et informatiques à venir, si les contingences techniques sont aussi fortes ?
Bien entendu ! Il y a de nouveaux systèmes incroyables, des contrôleurs MIDI avec un pad qui permet de faire énormément de choses par exemple. Le hic, c’est que ça coûte vraiment très cher. Mais il est sûr que ce genre d’avancées technologiques ouvre des opportunités et des possibilités énormes.

Tu ne peux pas essayer d’avoir des contrats avec des fabricants ?
Si, c’est possible mais on préfère se la jouer « bricolo » ! On a peut-être tort. Rien n’est logique dans ce disque, toute son histoire (de vieilles histoires de contrat et d’avances avec une maison de disque) frise le n’importe quoi, alors on continue !

Ce n’est pas forcément plus mal puisque ce « n’importe quoi » semble créatif !
Même si nous faisons n’importe quoi, nous savons que ce n’est pas forcément une mauvaise solution.

D’après tout ce que tu évoques de ta démarche, tu sembles arpenter des chemins proches de ceux d’Olivier Sens ou de Benoît Delbecq… As-tu l’impression qu’une « scène » est en train de naître ?
C’est un milieu que je découvre totalement. On vient tous du jazz, mais j’ai rejoint le bateau assez tard. J’entrevois à peine ce milieu qui est en fait très diffus et assez international. Il est certain que n’emprunte pas une autoroute bien balisée.

Êtes-vous en contact les uns avec les autres ?
Nous sommes en contact avec Benoît Delbecq et quelques musiciens par-ci par-là comme Vincent Artaud. Cependant, chacun évolue dans son univers avec sa gravité personnelle.

Comment es-tu arrivé dans l’electro ? Etait-ce une musique que tu écoutais ou est-ce le fait de rencontres ?
Un peu des deux sûrement. J’utilise l’ordinateur depuis l’époque des Mac où il fallait trois disquettes pour charger le système. Mettre la musique derrière un écran d’ordinateur reste donc familier. Aux alentours de 2000, quand sont sortis les G3 et les PowerPC, j’ai exulté : on pouvait enfin faire du vrai traitement audio, les machines avaient les capacités de suivre. En même temps, je découvrais la drum and bass, on était en pleine période house, la jungle déchirait tout à Londres. C’était vraiment une époque intéressante !

Tu en parles au passé… écoutes-tu encore aujourd’hui ces courants musicaux ?
Absolument !

Une question de lecteur : tu as fait des études de philosophie. Penses-tu que ce type de pensée et d’approche a un lien avec ton activité musicale, ou sont-ce deux univers bien séparés ?
(Hésitation) Je ne sais pas. Les raisons pour lesquelles j’ai fait de la philo sont peut-être les mêmes que celles pour lesquelles j’ai fait de la musique… Je m’apercevais que je faisais fausse route en faisant de la philo. Après, je ne sais pas du tout si c’était une fausse idée que j’avais de moi-même ou un désir sérieux.

Quels sont tes projets à venir ?
Poursuivre la collaboration avec Otisto 23, continuer de tourner avec le trio, enregistrer un prochain disque sans doute avec le trio… Je commence à me rendre compte que mes envies vont dans plein de directions différentes. Je me surprends moi-même ! Je comprendrais que les gens aient du mal à me suivre. Mais j’ai abdiqué, je ne cherche plus à comprendre les raisons de mon fonctionnement, je vais là où me guident mon plaisir et mes envies. J’aime bien changer, mais je n’aime pas lâcher. L’idée d’exploration ne va pas contre celle de la permanence.

Propos recueillis par Fanny Layani & Antoine Pinaud
Photos de Fabrice Journo

site web : http://www.laurentdewilde.com

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