ENTRETIEN : NEMO | |
Origine : France Style : Rock progressif Formé en : 2000 Composition : Jean-Pierre Louveton : chant, guitare Guillaume Fontaine : claviers, choeurs Lionel B. Guichard : basse Jean-Baptiste Itier : batterie Dernier album : Si Partie 1 (2006) Photos : Nemo, Jean-Luc Cruwels, Pierre Romainville. | En pleine ascension, Nemo n’a pas fini d’étonner les connaisseurs par sa capacité à se surpasser à chaque fois. Dans l’attente de la suite au très réussi Si…, Jean-Pierre Louveton, le mentor du groupe livre à Progressia ses convictions sur sa carrière et quelques surprises…
Progressia : Avec un peu de recul, quelles ont été les réactions face à Si Partie 1 ? Jean-Pierre Louveton : Comme avant chaque album, nous avions le doute normal du créateur, ne sachant pas à quelle sauce nous allions être mangés. Par ailleurs, plus on fait d’albums, plus la pression grandit… la peur de ne pas faire aussi bien. Ceci dit, l’accueil a été plus que satisfaisant vu que quasiment tous les critiques ont jugé que l’album était notre meilleur.
Le groupe a vendu beaucoup d’albums en Allemagne…. Pourquoi ce succès en Allemagne ? Nous avons à ce jour vendu un tiers des exemplaires de Si Partie I en Allemagne, c’est-à-dire environ trois cent. Je crois savoir que le public là-bas est plus ouvert et a gardé de bons souvenirs de l’époque Ange. Nous avons eu en fait d’excellentes critiques dans les plus gros fanzines et avons même été classés dans le Top 5 du deuxième trimestre dans Progressive Newsletter. De plus, les radios prog ont passé en boucle tout l’album. Ajoute à cela une bonne distribution, et on obtient peut-être quelques éléments d’explication.
Tu parles de public plus ouvert en Allemagne… comment l’expliques-tu ? Je ne connais pas les Allemands personnellement… En tout cas, ils semblent avoir des émissions radio spécialisées qui ont l’air d’être écoutées.
Parlons de l’album. Comment as-tu développé cet énorme concept qui va occuper deux albums ? Comment s’est déroulé le processus d’écriture dans le groupe et l’enregistrement? Tout d’abord, le concept a été, comme d’habitude, conçu par Guillaume et moi-même. Nous souhaitions parler de la génétique et de ses futures dérives. Nous avons alors cherché tous les abus pouvant être commis par l’humanité, avec de bonnes intentions souvent. Et nous avons retenu six sujets qui sont développés sur six titres.
Pour le néophyte, lesquels ? Dans « Douce Mort », c’est l’utilisation des organes humains à des fins diverses, notamment pour les blessés de guerre. Dans « Ici, Maintenant », nous avons voulu parler d’immortalité, dans « Miroirs » de l’apparence, plutôt que de se maquiller, pourquoi ne pas se faire greffer l’apparence que l’on souhaite ? « Si » parle de la possible marchandisation de la vie, le jour où on l’aura trouvé comment ressusciter les morts. Le morceau est le point de vue d’une mère qui donnerait tout pour revoir son fils mort… Et le cinquième thème (« Apprentis sorciers ») est la manipulation génétique sur les plantes, qui conduira, nous en sommes sûrs, au contrôle total sur la nourriture par les grandes multinationales, juste avant que la nature en meure. Gai, non ? Le sixième thème est abordé dans Si Partie II.
Est-ce qu’il concernera la totalité de Si Partie II ? Oui, c’est un thème unique… Pour revenir à l’enregistrement, nous avons fait exactement comme d’habitude : nous réunir dans notre local et faire tourner les idées des individus ou celles trouvées sur le moment. Quasiment tout est, si ce n’est écrit, au moins structuré dans ces conditions : à quatre dans notre local. Pour l’enregistrement idem, avec une participation plus poussée de Guillaume Ninon qui nous a bien aidés au niveau des prises de son et du mixage.
Du nouveau matériel a-t-il été utilisé (on entend des samples de Mellotron par exemple) ? Guillaume a investi et dispose maintenant d’une palette sonore infinie, le Mellotron qu’on entend dans« Douce Mort » par exemple.
Le groupe semble n’avoir jamais sonné aussi sombre, était-ce voulu dès le départ dans le concept ? Oui, c’est sombre, mais il ne me semble pas que ce soit une composante nouvelle. J’ai écouté Black Sabbath toute ma jeunesse et j’ai une certaine affection pour ce genre de musique. Peut-être les thèmes abordés s’y prêtaient-ils, bien que nos textes ne soient jamais très gais. Je pense que ça tenait surtout de l’humeur du moment.
Les chroniqueurs semblent unanimes, l’histoire de Nemo a jusqu’ici suivi une pente ascendante. Beaucoup parlent même de meilleur album du groupe à propos de Si… . Cela met-il pas une pression énorme pour le suivant ? Ne va t-il pas être automatiquement moins bien ? Tu sais, on ne contrôle pas tout et surtout pas ce que le gens vont penser de nos albums. La seule chose que l’on sait, c’est que nous donnons toujours le meilleur de nous-mêmes dans l’écriture, car c’est notre passion. Chaque album est différent, et le jour où nous nous retournerons pour regarder derrière n’est pas arrivé. Bref, Si Partie II a été écrit dans la foulée du I, sans pression particulière de ce point de vue. De plus, le fait de vendre peu de disques a au moins un avantage : nous gardons une liberté totale sur la création.
Le groupe a sorti un album par année depuis 2002 (à l’exception de 2005 où ce fut un live), sans compter tes albums en solo. Ne crains-tu pas un certain essoufflement créatif dû à ce rythme intense ? Non… Pourquoi sortons-nous tous ces albums ? Ce n’est ni pour gagner de l’argent, ni pour battre un record. Les idées sont là, et je crois sincèrement qu’il faut les choper tant qu’on les tient. A aucun moment, nous n’avons dû nous forcer à écrire ou faire du remplissage. Au contraire, nous nous retenons. Ce que je voudrais que les gens comprennent, c’est que c’est vraiment une passion, et que si je pouvais financièrement sortir deux albums par an je le ferais.
Penses-tu donc continuer à ce rythme tant que le flow d’idées sera présent? Pas forcément car le facteur temps entre en compte. Plus nous avançons, plus nous avons des propositions de concerts et autres, et il arrivera un moment où nous ne pourrons pas tout faire. Je pense d’ailleurs qu’après Si Partie II une petite pause sera bienvenue ! Pour l’enregistrement de la partie deux, quelles innovations le groupe va-t-il apporter ? Comment se développera la thématique ? Nous sommes en plein enregistrement. Nous essayons toujours de trouver de nouvelles choses, et, sans révolutionner notre musique, je pense que la plupart des idées contenues dans Si Partie II sont très originales. Concernant la thématique, l’idée est de faire une seule et même suite sur le même thème de texte. C’est en fait le sixième thème dont nous parlions plus tôt.
Peux-tu nous en dire plus ? [NdR : lors de l’entretien, notre ami JP n’a rien voulu laissé filtrer sur ce sixième thème. Toutefois, il n’a pas su tenir sa langue bien longtemps. Il vient de cracher le morceau sur notre forum !]
Ce sixième thème, ou plutôt cette sixième dérive possible des avancées de la génétique, sera l’être parfait ou autrement dit : l’homme idéal. Et c’est pour cela que l’album sera titré Si – Partie II : l’homme idéal, et sera constitué d’une longue suite d’environ 56 minutes, divisée en 10 plages. L’album pourra donc être appréhendé de deux façons : soit comme un unique morceau, soit comme un recueil de 10 chansons traitant du même thème, mais de différentes façons. Plusieurs fils rouges constituent l’armature de ce morceau, y donnant une unité sur quasiment une heure, tandis que chaque piste pourra en être extirpée aisément. C’est en tout cas ce que nous avons voulu faire. Un single sera même tiré de l’album : le morceau chanté le plus court de notre discographie !! L’album sortira début 2007 et il y aura vraisemblablement une prévente.
Dans le registre live, le groupe semble plus tourner que par le passé. Te sens-tu – ainsi que le groupe – de plus en plus à l’aise sur scène ? Effectivement, et 2007 promet d’être une grande année scénique pour Nemo. Je n’en dis pas plus car rien n’est officiel, mais ça risque d’être bien ! [NdR : nous ne saurons rien de plus en effet, mais sachez que depuis l’entretien, Nemo a annoncé qu’il jouera pour la première fois en Suisse aux Montreux Prog Nights.]
A moyen terme, le groupe compte-t-il rester autoproduit ou envisage-t-il la recherche d’un label ? Est-ce que les bonnes ventes de « Si partie I » pourraient aider à obtenir un deal plus intéressant ? Nous resterons autoproduits tant que nous n’aurons pas de propositions sérieuses. Et je ne pense pas, avec les ventes que l’on réalise pour le moment, qu’un label important soit intéressé. C’est la dure réalité de devoir choisir entre se débrouiller seul ou laisser mourir le groupe dans les mains d’un petit label.
Penses-tu à des splits dus au manque de soutien (label ou public) comme cela s’est passé avec Zaar ? Par exemple, et aussi au fait que les labels doivent se rembourser et ensuite gagner de l’argent avant que les artistes ne puissent voir le fruit de leur travail. Il n’est pas rare que les groupes ne touchent pas un centime sur les ventes d’albums qu’ils ont eux mêmes réalisés.
Est-ce que Nemo existerait encore aujourd’hui sans les sites Internet de musiques progressives qui vous soutiennent depuis au minimum le troisième album ? Clairement : peut être. Mais il n’y aurait pas eu quatre albums. Nous avons pu faire un deuxième, puis un troisième album car nous avons senti que des gens étaient intéressés. Certains nous disaient adorer notre musique ! Sans intérêt de leur part, à quoi bon faire des albums ?
As-tu d’autres projets en cours ? J’ai ouï-dire que tu as prêté tes talents de guitariste au projet Path Through the Mist de Benoît Fournier, le rebouteux de Lac Placide. Comment s’est déroulée cette collaboration ? Tu es bien renseigné ! En fait, Benoît m’a fait écouter quelques-unes de ses créations. J’ai trouvé ça original et très personnel. Je lui ai proposé de jouer de la guitare sur un titre ou deux et finalement, je joue sur tous ! Il voulait en fait de la matière à travailler pour enrichir ses compositions et il a trituré dans tous les sens ce que j’ai enregistré. Le résultat est assez étonnant et très agréable.
Un dernier commentaire pour les lecteurs de Progressia? Progressia possède un forum où il fait bon traîner, et j’y suis depuis quelques années déjà ! Il s’y crée des amitiés et il m’est arrivé de rencontrer beaucoup des personnes avec lesquelles j’ai virtuellement lié une amitié, lors de concerts de Nemo notamment. Ce forum et ses forumeurs fait mentir tous ceux qui disent que l’Internet est superficiel ! Et nous remercions tous ceux qui nous suivent depuis le premier album, et qui sont toujours là !! Merci à Progressia pour sa fidélité. Propos recueillis par Jean-Daniel Kleisl site web : http://www.nemo-world.com retour au sommaire |