INTERVIEW : ARK | |
Origine : Scandinavie / USA. Style : Metal progressif Formé en : 1990 Line-up: – Jorn Lande (chant) – Tore Østby (guitare) – John Macaluso (batterie) – Randy Coven (basse) – Mats Olausson (claviers) Dernier album : Burn the sun (2001) | Après l’engouement majeur qu’a suscité la sortie de son premier album, éponyme, le groupe norvégien, renforcé par les arrivées du bassiste Randy Coven (Steve Vai, Alice Cooper, Blues Saraceno, CPR) et du claviériste Mats Olausson (Yngwie Malmsteen), fait encore parler de lui avec Burn The Sun, destiné à rencontrer au moins le même succès que son prédécesseur. Et c’est entre un jambon-beurre et un soda que Jorn Lande (chant) et Tore Østby (guitare) nous ont reçus. EmbARKement immédiat pour un voyage dans les contrées de Jorn et de Tore, où "le monde est un seul pays"… Progressia : Le succès rencontré par votre premier album a dû vous laisser pantois, j’imagine ? Jorn Lande : Bien sûr ! C’était incroyable ! Et Dieu sait que ça n’a pas été facile ! Le fait de n’avoir pu nous mettre une étiquette a éveillé la curiosité des fans… mais on ne s’attendait pas à autant d’engouement. Musicalement, nous nous sentons libres dans Ark, nous avons la chance de ne pas avoir trop de contraintes artistiques imposées par notre label. En bref, on fait ce qu’on veut et si on gène des gens, tant pis, cela nous pose aucun problème ! Tore Østby : Honnêtement, on s’attendait à être descendus : quand tu débarques avec un premier disque aussi expérimental, tu ne sais pas à quoi t’attendre. C’est du quitte ou double ! Est-ce dur de donner un successeur à un album comme Ark ? Tore : C’est une question intéressante… je pense qu’il y a deux manières de faire de la musique. Soit tu te dis : « je veux toucher cette catégorie de gens », auquel cas tu composes de la musique commerciale, tu fais des compromis avec ton label et tu te fais mener à la baguette, soit tu écris sans aucune arrière-pensée, en incluant tes expériences et tes sentiments. En ce qui nous concerne, nous nous situons davantage dans cette veine. Je pense aussi que c’est une question de personnalité, et que l’état d’esprit dans lequel tu es à ce moment-là t’influence. A partir de là, rien n’est impossible et je peux dire que cela ne nous a pas paru difficile de donner une suite à Ark. Jorn : Nous sommes honnêtes avec nous-mêmes et envers nos fans. Ark laisse transparaître ce que nous étions, ce que nous sommes et ce que nous deviendrons. Cela comprend également toutes les questions qui nous hantent : que nous réserve le futur, pourquoi se sert-t-on de la religion à des fins fanatiques alors que celle-ci devrait logiquement rapprocher les peuples au lieu de les confronter, et ainsi de suite… Pourquoi le monde est si bordélique ? Tu ris, tu pleures et tu pètes les plombs, tu peux jouer dans le groupe le plus violent de la planète, tu restes fragile. L’amour est le sentiment qui dirige l’être humain et ce dernier s’en éloigne. Je crois que tout cela se reflète dans notre musique. Qu’avez-vous à dire sur ce nouvel album ? Jorn : Pour ce nouveau disque, nous avons inclus, en plus du heavy déjà présent sur Ark, des influences encore plus diverses, comme Björk ou Peter Gabriel. Ajoute à cela les influences flamenco de Tore et le jeu très technique de John Macaluso, qui a d’ailleurs introduit des grooves jungle & drum’n Bass… Tore : On pioche partout ! John est autant accro à Terry Bozzio qu’à Keith Moon en passant par Pink Floyd, c’est dire ! Le line-up a récemment été complété par l’arrivée de Randy Coven à la basse et Mats Olausson aux claviers. Sont-ils membres officiels ou des musiciens additionnels ? Tore : John a joué avec Randy Coven dans différents contextes, et à chaque fois, il a senti que le courant passait bien entre eux. Randy est donc venu en studio, sans connaître les morceaux et nous lui avons dit d’être le plus spontané possible, de se lâcher. Cela s’est passé de la même manière avec Mats Olausson, toujours grâce à John. Il a lui aussi les morceaux du premier album et nous l’avons laissé libre d’apporter son style. Et ça a marché ! Ils sont aujourd’hui membres officiels d’Ark, même si Jorn, John et moi-même restons le noyau principal du groupe. Est-ce que Mats et Randy ont participé à l’écriture de Burn The Sun ? Jorn : Ils n’ont pas participé à l’écriture, puisque la première moitié de l’album a été écrite chez John à New York et l’autre moitié a été composée en Norvège, chez moi. Nous y avons tout enregistré sauf la basse et les claviers, et à l’époque, lorsque nous réfléchissions à des membres supplémentaires, certains noms sont déjà revenus fréquemment. Lorsque nous avons demandé à Mats et Randy de venir, ils ont appris les titres qui avaient été écrits. Mais j’insiste sur le fait que nous ne les avons pas restreints musicalement, ils ont vraiment joué ce qu’ils voulaient. C’était l’une des conditions que nous leur « imposions » et ça a bien fonctionné. Je pense que les autres groupes devraient faire pareil : laissez les nouveaux s’exprimer librement. Ça a vraiment libéré Mats et Randy dans la mesure où ils se sont totalement lâchés. Ils étaient très fiers du résultat et il est évident que nous collaborerons tous les cinq pour le prochain album d’Ark, même si là encore, Tore, John & moi-même apportons l’essentiel des idées. Vous semblez avoir de fortes personnalités, est-ce difficile de travailler ensemble ? Tore : Non, pas du tout ! Au contraire ! Que ce soit en musique ou dans un autre domaine, tu dois d’abord savoir qui se trouve en face de toi. Une fois que tu connais ton interlocuteur et que tu sais de quoi il est capable, tu en tires le meilleur. C’est le cas dans Ark : il y a bien cinq personnalités différentes, mais comme tout le monde a plus ou moins la même mentalité, tout se passe bien et de manière harmonieuse. Nous ne sommes vraiment pas difficiles. Tant qu’il y a une bonne alchimie, il n’y a aucune raison de se prendre la tête (rires) ! Parlons de Burn The Sun. Est-ce une suite à l’histoire entamée dans Ark ? Jorn : Burn The Sun a le même message que le premier album. Tout ce que nous allons faire avec Ark, pour le restant de nos jours, y est plus ou moins représenté. Ark laisse transparaître nos personnalités, nos sentiments, nos pensées et notre état d’esprit. Le message est donc le même : Ark est notre vie, notre ambition, nous capitalisons dans Ark pour le futur. Si l’on pouvait mettre un peu de soleil dans nos pipes plutôt que du tabac, ce serait chouette ! Cette planète est en train de sombrer dans la folie à cause de l’ignorance humaine, du capitalisme et ce, au détriment de choses vraiment importantes comme la protection de la nature ou la sauvegarde de l’environnement ! Aujourd’hui, Monsieur X n’a qu’une seule envie, c’est de savoir si Monsieur Y va répondre à Monsieur Z : « C’est mon dernier mot » et si effectivement il va gagner des millions. C’est tellement frustrant… Attention, je ne prétends pas avoir de solution mais c’est dramatique de voir ça… tu n’oses même plus penser à ce qui pourra bien se passer plus tard (rires). Pourtant la roue tourne et tu peux tout changer si tu y crois, c’est une question de point de vue ! Cela dit, d’autres personnes ont déjà abordé le sujet et ça a ruiné leur vie ! Ils ont donc arrêté d’en parler et nous reprenons le flambeau pour l’avenir et pour un monde meilleur. Même si on ne peut pas arrêter le processus, on ne pourra pas dire que nous n’avons pas essayé. Tu sais, avec tout ce que tu entends, ce que tu vois, ce que tu lis, il est dur de te faire une opinion sur quoi que ce soit ! Mais je pars du principe qu’un jour ou l’autre tout s’arrangera et qu’on finira par mettre du soleil à la place du tabac dans nos pipes (rires). Musicalement, beaucoup de gens ont dit que l’album rappelait, par moments, In Your Multitude de Conception. Tore qu’as-tu à dire pour ta défense ? Tore : … Dans la mesure où j’étais le principal compositeur de Conception, ça ne me surprend pas… Il y de ma personnalité tant dans les titres de Conception que dans les titres de Ark ! Mais comme nous l’avons dit auparavant, c’est principalement une question de feeling : si tu veux exprimer vraiment ce que tu ressens, tu ne peux te limiter à un seul et même style. Tout dépend de ton humeur et de ton état d’esprit ! Ark est universel et à travers passent tout un tas de sentiments de la frustration à l’amour… Jorn : La musique est universelle, et le monde est un seul et même pays, nous avons décidé d’appeler cela de la sorte ! Le monde n’est pas tout ce tas de pays dont tu entends les noms partout ! Par exemple, Tore a des influences flamenco, n’est-ce pas ? Hé bien les Norvégiens aiment les filles espagnoles blondes ! De même pour les Espagnols, ils aiment les blondes norvégiennes ! Tu vois ce que je veux dire… Jorn, ton chant est très varié sur Burn The Sun. J’ai pensé par moments à Sammy Hagar (ex-chanteur de Van Halen), mais aussi à d’autres vocalistes comme Chris Cornell ou Peter Gabriel… Jorn : (visiblement surpris) Wow ! Sammy Hagar ? Je ne chante pas comme lui, mais peut-être que, de temps en temps, j’utilise des intonations qui lui sont propres… Je t’avouerai que je n’y ai pas trop pensé ! Je suis plus influencé par des gens comme David Coverdale ou Ronnie James Dio… En fait, tout un tas de chanteurs m’inspirent (rires) ! Peter Gabriel fait effectivement partie de ces influences. Concernant Chris Cornell, je dois dire que je n’ai pas trop écouté Soundgarden et je n’ai pas d’album de ce groupe. En toute honnêteté, je n’ai entendu qu’un seul titre d’eux et ça ne m’a pas marqué du tout. Cela dit, j’ai tout de même apprécié la voix de Chris Cornell… c’est un excellent chanteur ! Cependant comme je l’ai dit, ils ne m’ont pas laissé un souvenir impérissable. Je devais certainement être dans un état d’esprit différent de celui dans lequel je suis actuellement. Qu’en est-il de nouvelles compositions ? On sait que Burn The Sun était déjà à moitié écrit quand Ark est sorti… Tore : C’est presque le même cas de figure : nous avons déjà pas mal d’idées pour notre troisième album, ce qui est plutôt encourageant. De plus, avec l’apport de musiciens comme Randy Coven et Mats Olausson, nous verrons comment cela fonctionne entre nous puisqu’ils seront impliqués dans l’écriture. Nous sommes impatients de voir le résultat. Je pense qu’à tout point de vue, ce troisième album sera très intéressant… (NdRC : à plus d’un titre, si l’on ose dire, puisque Jorn Lande, atout du groupe, le quittera pendant l’écriture de ce troisième album. Celui mettra dès lors bien plus de temps pour sortir et, au jour où nous publions cette archive de Progressia "papier", un nouveau chanteur n’a toujours pas été annoncé.) Quand verra-t-on Ark en concert ? Savez-vous que le public français meurt d’envie de vous voir sur scène ? Tore : On y pense, et cela devrait se faire bientôt ! Nous avons actuellement des obligations contractuelles, et nous sommes en discussion avec cinq labels pour nous distribuer en Europe ! C’est tout une machine qu’il faut mettre en place, mais comme je l’ai dit, nous avons quelques concerts de prévus ici et là. Rien de bien précis mais patience, votre attente sera récompensée, je vous le promets ! Nous sommes vraiment impatients de jouer live ! Qu’avez-vous à dire à votre public français ? Tore : Merci pour tant d’attitudes positives à l’égard de notre premier album, nous n’en espérions pas tant ! Sachez que nous apprécions votre soutien ! Nous espérons que vous apprécierez Burn The Sun autant que Ark ! En retour, nous n’avons qu’une envie c’est de vous rencontrer et de jouer live pour vous… Jorn : Merci de ne pas avoir copié Burn The Sun (rires) ! Prenez le temps d’écouter cet album, vous ne l’apprécierez que plus ! Dernière question : définissez la musique de Ark en trois mots… Jorn : Trois mots ? C’est difficile… peut-être A.R.K. (rires – NdDan : décidément, il n’est pas prêt d’atterrir !) ? Tore : Je pense plus à des mots comme personnalité, feeling et expression. Propos recueillis par Dan Tordjman site web : http://www.arksite.com |