Metá Metá - MM3

Né à São Paulo à la fin des années deux mille, le trio Metá Metá est l’un des nombreux représentants de la contestation qui se répand de plus en plus au Brésil contre l’oligarchie corrompue. La déroutante association du jazz, du punk-rock et de touches afro-brésiliennes s’accorde on ne peut plus idéalement avec le caractère politiquement incorrect du groupe. Entre suavité, scansion révoltée et psalmodie, la chanteuse Juçara Marçal surligne les à-coups d’une musique à la fois accessible et exigeante, qui charme autant qu’elle gronde. Renforcé par un bassiste et un batteur, ce troisième album est une fois encore à l’image des contrastes d’un pays aux multiples disparités. « Três Amigos » ou « Imagem do amor » soufflent le chaud et le froid en nous prenant par la main, tout en douceur, animées d’une fausse tranquillité, pour s’emballer soudainement et nous confronter à l’urgence de leurs thèmes. L’alternance de moments calmes, presque mélancoliques parfois (« Angolana ») et la fébrilité, voire la colère, est d’ailleurs l’une des caractéristiques principales de MM3. Cette propension à la frénésie atteint son paroxysme sur « Corpo vão » et sur l’interprétation quasi extatique d’« Obá Kosô ». Et même lorsqu’un rythme sud-américain invite à se déhancher avec indolence (« Toque certeiro »), ce n’est jamais pour batifoler innocemment. Le saxophone de Thiago França et la guitare de Kiko Dinucci peuvent faire leurs yeux de biche avec des sonorités chaudes et confortables puis montrer les dents à grand renfort de motifs incisifs et compacts (« Angoulême ») jusqu’à vociférer en plaintes dissonantes (« Obá Kosô »), tels des poings levés porteurs de l’engagement de Metá Metá. On ne peut que saluer Jazz Village d’avoir signé ce groupe atypique – repéré notamment lors de son passage aux Transmusicales de Rennes en 2014 – et de lui donner la possibilité de délivrer en chair et en os un message de dissidence sur une musique unique en son genre.