Krokofant - Krokofant

Situé à environ quatre-vingts kilomètres d’Oslo, la ville de Kongsberg abrite en son sein trois musiciens norvégiens hors pair. Signé sur le label de même origine Rune Grammofon, célèbre pour regrouper les groupes Motorpsycho et Supersilent entre autres, Krokofant adopte une voie dissidente par rapport à la vague jazz moderne qui sévie depuis quelques années déjà en Scandinavie.

Avec une concentration très dense en musiciens, la Norvège, dont la population au kilomètre carré n’excède pas les treize habitants, intrigue par sa singularité artistique. En effet, les groupes nordiques détiennent la clef des portes faites de glace. Krokofant prend à contre-pied l’auditeur en savonnant les pistes, méandreuses et tortueuses, dans un confluant d’influences tantôt jazz, tantôt free-jazz avec une puissance décapante.
Composé d’un guitariste redoutable, d’un batteur bondissant mais légèrement sous mixé et d’un saxophoniste hurlant, Krokofant pratique la variation. Un thème hyperardu et probablement écrit est lancé au démarrage, tourne sur lui-même, et divague progressivement dans un maelström improvisé entêtant mais parfois un peu longuet. Cela joue merveilleusement bien, mais le déséquilibre entre ce qui est prédéfini et ce qui ne l’est pas apparaît comme tellement déséquilibré qu’il reste au final une grande interrogation. De plus, chaque morceau est le résultat d’un calque. Structure identique, longueur des morceaux et improvisation systématique rendent l’écoute de ce premier album délicate.
Les sonorités rugueuses, âpres et consistantes et l’intelligence de l’agglomérat guitare/saxophone/batterie font véritablement de Krokofant un album précieux. Cependant, mais ce n’est peut-être pas son but, le côté complexe d’approche devrait être à l’avenir facilité par plus d’imagination dans la manière d’annoncer les couleurs et les changements de parties bien trop peu nombreuses. Krokofant peut mieux faire, c’est certain !