– … ou de la difficile existence du critique musical
À moins de disposer d’une notoriété suffisante et de pouvoir se pavaner sur les plateaux de télé en décidant de ce qui est de la bonne musique ou pas, la vie d’un chroniqueur, et plus particulièrement celle d’un chroniqueur moyen de webzine, bien qu’animée par une indéfectible passion, n’est pour ainsi dire pas des plus gratifiantes. Loin du cliché du musicien frustré, le chroniqueur défend avant tout la musique qu’il aime et n’en tire au bout du compte qu’une maigre compensation, le plus souvent le simple plaisir d’être lu et de contribuer à la propagation de la « bonne parole ».
Une armée de fans est une sacrée aubaine pour les maisons de disques, en somme. Car si les grosses cylindrées signent chez les majors et bénéficient d’un traitement télévisuel, radiophonique, ou encore disposent d’encarts publicitaires conséquents, la plupart des artistes font leur promotion via la presse spécialisée et l’Internet, grâce notamment à une myriade de fanzines et webzines (sans parler des innombrables blogs) dédiés à des genres tout aussi pléthoriques.
Dès lors, le rôle de l’armada de chroniqueurs qui sévit dans cette presse dématérialisée – et gratuite ! – est déterminant pour bon nombre de labels. En effet, les audiences cumulées des webzines peuvent rapidement atteindre des chiffres très élevés, y compris dans les niches musicales…
Pourtant, il arrive que le critique soit accusé de tous les maux : il devient un être subjectif et incompétent lorsqu’il ose émettre un avis défavorable, et par-dessus le marché, il diffuse illégalement sur le réseau les œuvres qu’il chronique. Certaines plates-formes de promotion (rares, fort heureusement !) vont jusqu’à conditionner l’envoi d’un disque à la publication d’une chronique favorable…
Parallèlement, un effet « fanboy » flagrant sévit bel et bien chez ces journalistes musicaux amateurs. La subjectivité et le désir de faire sortir de l’ombre leurs genres et artistes favoris donnent souvent lieu à des articles plus élogieux que de raison, ce qui assure aux labels une promotion positive à coût nul. En outre, loin de contribuer au piratage, les chroniqueurs-fans achèteront souvent le produit à sa sortie officielle (voire ses éditions limitées, et autres attrape-nigauds), même après avoir reçu le support promotionnel.
Car à supposer qu’ils fassent partie d’une structure suffisamment organisée, d’un fan / webzine suffisamment lu et reconnu, leur seule « rémunération » prend souvent la forme de ce précieux disque promotionnel, maigre privilège accordé en contrepartie du travail et de l’investissement personnel conséquent que nécessite une analyse approfondie de l’œuvre.
Et le respect de ce travail n’est pas toujours manifeste : quand il ne s’agit pas purement et simplement d’un simple fichier MP3 à télécharger sur une plate-forme iPool, souvent de qualité discutable, des voice-over (voix enregistrées par-dessus la musique) rendent plus difficile le travail d’un rédacteur pourtant animé de bonnes intentions. Bien sûr, le tableau n’est pas si noir et certaines maisons de disques jouent encore le jeu.
On comprend d’ailleurs aisément que les petits labels désargentés confient la promotion de leurs artistes à des structures spécialisées, que l’envoi des disques à la presse peut être onéreux (quoiqu’il serait intéressant de comparer les coûts de l’envoi de supports physiques et le recours à des plates-formes numériques). Mais l’argument de la lutte contre le téléchargement illégal est caduc.
C’est le serpent qui se mord la queue : en voulant faire des économies, pour cause de « crise du disque », en mettant des fichiers MP3 à disposition des rédactions, les labels prennent tout autant le risque de voir un album disponible via les réseaux p2p avant même sa sortie. Aussi, en ne reconnaissant pas toujours le travail des chroniqueurs, ils risquent de s’aliéner ou de démotiver une partie des nombreux webzines bénévoles qui s’évertuent à promouvoir leur matériel.
Des solutions plus cohérentes existent pourtant. Le tatouage numérique (digital watermark) en est une. Le disque est marqué, de même que l’extraction en fichiers MP3 qui peut en être faite, ce qui permet de tracer un éventuel piratage. De toute manière, les indécrottables du support physique – et ils sont nombreux – continueront d’acheter des disques, CD, vinyles (qui, mine de rien, font un joli retour) ou autres. Les adeptes de la musique dématérialisée continueront pour la plupart à consommer du numérique comme on avalerait un Big Mac prédigéré.
Finalement, et au-delà des considérations parfois triviales évoquées dans ce billet d’humeur, la vie d’un chroniqueur met en lumière l’essentiel : le caractère marchand de la Musique et de l’Art en général. Jadis, les riches et les puissants étaient aussi mécènes, et les œuvres artistiques pouvaient vivre par elles-mêmes, recueillant le succès ou disparaissant à jamais dans l’ombre. Dans l’univers des musiques progressives, de nombreux artistes ne vivent pas de leur Art, et ne l’expriment que par pure passion désintéressée. Une espèce en voie de disparition ?
Une armée de fans est une sacrée aubaine pour les maisons de disques, en somme. Car si les grosses cylindrées signent chez les majors et bénéficient d’un traitement télévisuel, radiophonique, ou encore disposent d’encarts publicitaires conséquents, la plupart des artistes font leur promotion via la presse spécialisée et l’Internet, grâce notamment à une myriade de fanzines et webzines (sans parler des innombrables blogs) dédiés à des genres tout aussi pléthoriques.
Dès lors, le rôle de l’armada de chroniqueurs qui sévit dans cette presse dématérialisée – et gratuite ! – est déterminant pour bon nombre de labels. En effet, les audiences cumulées des webzines peuvent rapidement atteindre des chiffres très élevés, y compris dans les niches musicales…
Pourtant, il arrive que le critique soit accusé de tous les maux : il devient un être subjectif et incompétent lorsqu’il ose émettre un avis défavorable, et par-dessus le marché, il diffuse illégalement sur le réseau les œuvres qu’il chronique. Certaines plates-formes de promotion (rares, fort heureusement !) vont jusqu’à conditionner l’envoi d’un disque à la publication d’une chronique favorable…
Parallèlement, un effet « fanboy » flagrant sévit bel et bien chez ces journalistes musicaux amateurs. La subjectivité et le désir de faire sortir de l’ombre leurs genres et artistes favoris donnent souvent lieu à des articles plus élogieux que de raison, ce qui assure aux labels une promotion positive à coût nul. En outre, loin de contribuer au piratage, les chroniqueurs-fans achèteront souvent le produit à sa sortie officielle (voire ses éditions limitées, et autres attrape-nigauds), même après avoir reçu le support promotionnel.
Car à supposer qu’ils fassent partie d’une structure suffisamment organisée, d’un fan / webzine suffisamment lu et reconnu, leur seule « rémunération » prend souvent la forme de ce précieux disque promotionnel, maigre privilège accordé en contrepartie du travail et de l’investissement personnel conséquent que nécessite une analyse approfondie de l’œuvre.
Et le respect de ce travail n’est pas toujours manifeste : quand il ne s’agit pas purement et simplement d’un simple fichier MP3 à télécharger sur une plate-forme iPool, souvent de qualité discutable, des voice-over (voix enregistrées par-dessus la musique) rendent plus difficile le travail d’un rédacteur pourtant animé de bonnes intentions. Bien sûr, le tableau n’est pas si noir et certaines maisons de disques jouent encore le jeu.
On comprend d’ailleurs aisément que les petits labels désargentés confient la promotion de leurs artistes à des structures spécialisées, que l’envoi des disques à la presse peut être onéreux (quoiqu’il serait intéressant de comparer les coûts de l’envoi de supports physiques et le recours à des plates-formes numériques). Mais l’argument de la lutte contre le téléchargement illégal est caduc.
C’est le serpent qui se mord la queue : en voulant faire des économies, pour cause de « crise du disque », en mettant des fichiers MP3 à disposition des rédactions, les labels prennent tout autant le risque de voir un album disponible via les réseaux p2p avant même sa sortie. Aussi, en ne reconnaissant pas toujours le travail des chroniqueurs, ils risquent de s’aliéner ou de démotiver une partie des nombreux webzines bénévoles qui s’évertuent à promouvoir leur matériel.
Des solutions plus cohérentes existent pourtant. Le tatouage numérique (digital watermark) en est une. Le disque est marqué, de même que l’extraction en fichiers MP3 qui peut en être faite, ce qui permet de tracer un éventuel piratage. De toute manière, les indécrottables du support physique – et ils sont nombreux – continueront d’acheter des disques, CD, vinyles (qui, mine de rien, font un joli retour) ou autres. Les adeptes de la musique dématérialisée continueront pour la plupart à consommer du numérique comme on avalerait un Big Mac prédigéré.
Finalement, et au-delà des considérations parfois triviales évoquées dans ce billet d’humeur, la vie d’un chroniqueur met en lumière l’essentiel : le caractère marchand de la Musique et de l’Art en général. Jadis, les riches et les puissants étaient aussi mécènes, et les œuvres artistiques pouvaient vivre par elles-mêmes, recueillant le succès ou disparaissant à jamais dans l’ombre. Dans l’univers des musiques progressives, de nombreux artistes ne vivent pas de leur Art, et ne l’expriment que par pure passion désintéressée. Une espèce en voie de disparition ?