ENTRETIEN : HIROMI UEHARA
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Origine : Japon Style : Jazz fusion Dernier album : Time Control (2007) |
Pas encore la trentaine et déjà quatre albums à succès à son actif, la pianiste de jazz japonaise Hiromi Uehara emprunte la voie royale depuis ses débuts. Son petit dernier, le très fusion Time Control constitue un prétexte tout trouvé pour une présentation-éclair de cette musicienne surdouée, à la personnalité bien trempée.
J’ai lu dans votre biographie que vous avez débuté le piano à l’âge de six ans. Votre formation étant plutôt classique, qu’est-ce qui vous a menée au jazz ? J’ai commence à en écouter à l’âge de huit ans, il se trouve que ma professeur de piano adorait le jazz et elle avait beaucoup de disques !
A quel âge avez-vous commencé à composer vos propres morceaux ? J’ai débuté lorsque j’avais six ans. Je tenais une sorte de petit journal.
Vous avez étudié dans la célèbre université de Berklee comme certains artistes que vous citez dans vos influences, Dream Theater par exemple. Qu’appréciez-vous dans leur musique ? Qu’avez-vous appris dans un établissement comme Berklee ? J’apprécie tous les artistes qui font entendre une voix qui leur est propre. L’un des plus grands trésors que Berklee m’a apporté, c’est la rencontre avec tous ces grands musiciens.
Vous mentionnez également Oscar Peterson et Ahmad Jamal. Comment ont-ils influencé votre propre style ? Tous deux m’ont dit de croire en ce que je crois, c’est-à-dire de toujours rester moi-même.
Le succès est venu rapidement, votre premier album Another Mind s’est remarquablement bien vendu. Je suppose que c’était un peu inattendu. Comment avez-vous géré cette notoriété soudaine ? Réaliser de bonnes ventes, c’est bien, mais cela n’affecte en rien mon esprit. Je suis évidemment ravie de constater que de nombreuses personnes écoutent ma musique, mais je me dois de toujours regarder devant moi, d’essayer de découvrir de nouveaux paysages musicaux.
Vous dites être influencée par tout artiste ayant une grande énergie. En termes musicaux, que cela signifie-t-il ? J’entends par là de la musique qui crée des émotions, sait raconter des histoires.
Vos compositions sont à la fois puissantes et techniques. Pensez-vous que ces deux aspects soient aussi importants l’un que l’autre ? La technique n’est qu’un outil, tout comme le vocabulaire dans le langage. Il ne peut délivrer aucun message. Avant tout, il faut savoir comment raconter une histoire. Si la musique est un langage universel, la technique est en revanche quelque chose de dangereux dans la mesure où elle est susceptible de vous conduire à dire des choses inutiles. Il est important de n’exprimer que ce que vous pensez réellement, c’est cela, la vraie technique.
Vous n’aimez pas que l’on mette une étiquette sur votre musique, mais Time Control, tout comme certains de vos précédents albums, est très fortement orienté vers la fusion, certains diraient vers le progressif. Pensez-vous à ce genre de choses lorsque vous composez ? Non, tout vient naturellement.
Quelles sont selon vous les differences entre Time Control et vos précédentes productions ? Cet album est davantage celui d’un groupe. C’est pour cela que le projet porte son propre nom, Hiromi’s Sonicbloom.
Comment la guitare de David Fiuczynski s’est-elle intégrée à Time Control ? J’ai toujours été une grande admiratrice de son groupe Screaming Headless Torsos et sur mon premier album, il a participé en tant qu’invité sur un titre. La première fois que j’ai joué avec lui, j’ai trouvé la combinaison entre mon piano et sa guitare très intéressante et depuis lors, j’ai souhaité faire un CD complet avec lui.
Quel est précisément le concept qui se cache derrière Time Control ? J’ai tellement voyagé ces deux dernières années que j’ai sérieusement commencé à m’interroger sur le concept de temps. J’ai constamment été confrontée aux décalages horaires, il a donc naturellement éveillé mon intérêt. Lorsque je suis occupée, j’ai l’impression qu’il me contrôle, même si finalement c’est moi qui suis responsable de mon emploi du temps. Chaque jour a ses 24 heures, mais certains me semblent si courts, et d’autres si longs… Le temps exerce un grand contrôle sur l’esprit, c’est pour cela que j’ai commencé à écrire quelques titres sur ce sujet.
Comment avez-vous rencontré Tony Grey et Martin Valihora ? Sont-ils uniquement des musiciens de concerts et de sessions, ou contribuent-ils à votre travail ? Je les ai rencontrés à Berklee, nous y étions la même année. Ils contribuent énormément à ce que j’écris, je compose toujours en fonction du son des musiciens avec lesquels je travaille. Je connais parfaitement leurs qualités et je veux qu’elles soient entendues.
Il y a bien d’autres choses que du piano sur vos disques. Vous utilisez des claviers Korg et Clavia, ce qui confère un son très années 70 et électronique à certains titres. Comment incluez-vous ces parties dans vos compositions ? Lorsque je compose, que j’entends mentalement des sons différents de ceux du piano, que le clavier m’appelle je joue, tout simplement. Les instruments de musique me parlent, ils guident mon jeu.
Savez-vous déjà comment sonnera votre prochain album ? Allez-vous poursuivre dans cette veine progressive ? Quels sont les genres que vous aimeriez explorer ? J’y travaille… ce seront de nouvelles aventures, comme toujours !
Vous allez tourner dans le monde entier ces prochains mois. Certains concerts vont-ils être enregistrés ? Projetez-vous de sortir un album live ou un DVD ? Rien n’est précisément planifié… mais nous avons enregistré quelques concerts pour la télévision.
Un dernier mot pour les lecteurs de Progressia ? Nommez la musique avec vos propres mots, sans règle. Je souhaite que quelque chose se situant au-delà des notes puisse toucher votre coeur en passant par vos oreilles !
Propos recueillis par Jean-Philippe Haas Photos : Frank Capri
site web : http://www.hiromimusic.com
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