ENTRETIEN : CASHMERE
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Origine : Pologne Style : inclassable Formé en : 2002 Composition : Tylda Ciolkosz – chant, violon Mariusz Wroblewski – basse Wojtek Siatkiewicz – batterie Dernier album : Cash-Romantic Music Machine (2006)
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Cette surprise venant tout droit de Pologne a de quoi surprendre : une ambiance décalée, des choix musicaux originaux… Il n’y a pas de doute, nous avons affaire à des personnes de talent, qui font preuve d’une maîtrise sans faille pour nous faire sourire à tout moment ! Rencontre avec la « tête pensante » de la formation, Tylda Ciolkosz.
Progressia : Bonjour Tylda ! Premièrement, peux-tu présenter CashMERE ? Comment cela a-t-il débuté ? Tylda Ciolkosz : CashMERE est né en décembre 2002 – ou janvier 2003 – quand Mariusz (« Doogie ») a rejoint notre groupe précédent. Beaucoup de choses se sont passées depuis, nous avons cherché un moyen pour nous exprimer, pour trouver un dénominateur commun, au niveau musical et non-musical, ce qui n’a pas toujours été facile. Si jamais nous devenons célèbres un jour ou l’autre, ces premières années seraient probablement survolées dans notre biographie. Disons que le premier évènement de notre carrière a été la sortie de Cash-Romantic Band, l’EP qui a précédé Cash-Romantic Music Machine.
Considères-tu CashMERE comme un groupe ou comme un duo, au regard de ton rôle important avec Mariusz ? CashMERE était un duo lors de la sortie de notre premier album Cash-Romantic Music Machine. Nous avons eu des problèmes pour trouver un guitariste prêt à rester longtemps avec nous, et pendant l’enregistrement notre batteur de longue date, Wojtek Siatkiewicz, a quitté le navire. Nous avons donc décidé de poursuivre en tant que duo, jusqu’à ce que l’on trouve une formation stable. Depuis que notre batteur actuel, ?ukasz Giergiel, nous a rejoints, la structure de notre « équipe créative » est bien plus cohérente. Nous espérons obtenir un effectif solide très prochainement, et devenir un groupe au vrai sens du terme.
Comment transmettez-vous la joie dans vos morceaux ? Difficile à dire… Ce n’est pas un processus que chacun de nous suit à la lettre. Faire de la musique est une source de joie en soi. De plus, un morceau est un moyen pour la transmettre à l’auditeur. Même si la chanson est pleine de tristesse ou de rage, le seul fait qu’il s’agisse du produit d’un travail créatif ajoute une touche de gaieté à l’ensemble.
Comment votre album Cash-Romantic Music Machine a-t-il été perçu depuis sa sortie ? Nous avons reçu de très bonnes chroniques. Bien sûr, il y en a aussi qui ne supportent pas notre musique ! Mais ce n’est pas une surprise pour nous, nous comprenons que nos chansons puissent être difficiles pour certains. Ceci dit, en général, l’album a été perçu comme étant innovant et intriguant, ce qui fait plaisir à entendre.
Quelles sont tes principales sources d’inspiration musicales et autres ? Concernant la musique, cela change tout le temps. Pendant l’enregistrement de l’album, je me rappelle avoir écouté beaucoup de Mr. Bungle, Einstürzende Neubauten, Rammstein, Planet X… Mais aussi Joe Jackson et Björk. En ce moment j’apprécie particulièrement Nine Inch Nails, The Dillinger Escape Plan et Miles Davis. Mais je ne cherche pas à mettre en avant l’un d’entre eux. J’ai tant d’idoles depuis toutes ces années… Les influences varient toujours. Et ce qui est non-musical ? Les livres et les films. Des expériences vécues ? Pas exactement. Ils sont à la base de tout ce que j’écris, mais il y a beaucoup de choses au-delà de cette base. Quand des expériences personnelles font surface dans mon travail, elles proviennent souvent de la littérature, du cinéma ou de la musique, parce que je suis très liée à ces moyens d’expression. Je pense que si l’on ne prend pas des distances par rapport à nos émotions, si l’on ne les passe pas à travers un « filtre artistique », on finit par écrire des journaux, pas de la musique. Il y a une histoire personnelle derrière chaque morceau, même si elle abordée au second degré comme sur « Horace The Wingless Wasp ». Lorsque je cherche des moyens pour l’adapter en musique, des pages s’ajoutent et des qualités totalement nouvelles voient le jour.
Quand vous définissez votre musique, vous dites « Appelez cela prog, porn-groove ou lala-rock. Vous pouvez même dire qu’il s’agit de pop, cela ne nous fera pas grand chose. Et puis vous pouvez aussi parler de jazz, si vous ne trouvez pas mieux. ». Pourquoi mixez-vous des styles si différents ? Parce que nous aimons cela ! Nous ne cherchons pas être catalogués. Aucun de nous n’a voulu être musicien de jazz, de punk ou de rock. Nous voulons être musiciens, point. Nous sommes versatiles, et nous apprécions l’être.
Votre musique est très diversifiée, comment gardez-vous cette cohérence ? Même si nos titres diffèrent l’un de l’autre, ce sont toujours les mêmes personnes qui les écrivent et qui les jouent. Les personnalités des musiciens font surface quelque soit le style abordé. De plus, si l’on enregistre toutes les chansons dans le même studio, avec le même ingénieur du son, cela aide beaucoup. Dominik Burzym, qui a mixé et masterisé Cash-Romantic Music Machine, a beaucoup travaillé pour rendre le son de l’album cohérent. J’ai toujours pensé que la diversité était quelque chose de très attirant dans un album. J’ai écouté récemment Ire Works, le nouvel album de The Dillinger Escape Plan. A la base c’est un groupe de metalcore, mais par moment sa musique sonne comme de la fusion, du rock progressif, du pop metal, ou comme la folie électronique d’Aphex Twin. C’est ce qui rend l’ensemble superbe. Pas une seule seconde, l’album ne me semble incohérent, parce que ceux qui l’ont créé restent fidèles à leurs goûts musicaux tout au long des titres. Je pourrais dire la même chose à propos de beaucoup de mes albums préférés. J’écoute une grande variété de genres musicaux, et je refuse de m’accrocher à un style en particulier. Je pense qu’en tant que groupe, nous aimons nous surprendre, avec tout ce qui peut arriver par la suite.
Quelques chansons comme « Jabbercrock » possèdent un côté décalé et parodique évident. Abordez-vous l’écriture de toutes les chansons de la même façon ? Ou correspondent-elles à des états d’esprit différents ? Evidemment, toutes nos chansons ne sont pas des parodies, mais la plupart sont humoristiques. Si certains morceaux de Cash-Romantic Music Machine ne sont pas humoristiques, c’est parce qu’ils sont plus anciens. Quand j’étais plus jeune je ne riais pas autant qu’aujourd’hui. Actuellement, j’aborde l’écriture avec une bonne dose d’humour. Bien sûr, des chansons différentes représentent des états d’esprit très différents, mais quelle que soit l’inspiration du moment, l’émotion accompagne toujours la composition, et l’humour fait toujours surface en cours de route. Les nouveaux titres sur lesquels nous travaillons sont généralement plus sombres que sur Cash-Romantic Music Machine, il y aura donc du sarcasme et de l’humour noir. Mais de l’humour, néanmoins.
Êtes-vous satisfaits de ce premier album ? Nous l’aimons tous, et nous en sommes fiers. Pensons-nous pour autant qu’il est parfait ? Non. Aurions-nous pu faire mieux ? Oui. Regrettons-nous pour autant de ne pas l’avoir fait ? Non. Ce disque représente le niveau auquel nous étions au cours de l’enregistrement. Nous avons beaucoup appris depuis et espérons évidemment aller bien plus loin avec le prochain album. Dans un sens nous ne sommes donc pas totalement satisfaits. Nous voulons plus. Plus de travail, plus de chansons, de développement.
Vous arrive-t-il de jouer souvent sur scène ? Modifiez-vous des parties de vos chansons pour ces représentations ? Pas autant que ce que l’on voudrait, mais c’est en partie dû à l’instabilité de notre effectif. Cependant, nous allons jouer de plus en plus, et espérons aussi dépasser les frontières de la Pologne. La forme de la plupart de nos morceaux est préservée lors d’une performance sur scène. D’autres titres sont légèrement modifiés, principalement à travers l’ajout de solos improvisés. Très souvent, le changement ne se fait pas sur la forme mais sur le son général. Certains passages ont tendance à sonner plus heavy sur scène, quand plus d’énergie est relâchée. Donc une partie qui est plutôt calme sur l’album peut être jouée beaucoup plus lourdement en concert.
Comment voyez-vous l’avenir de CashMERE ? Quels sont vos projets ? Mettre sur pied une formation, jouer en concert, puis jouer et jouer encore. En parallèle, nous continuerons à travailler sur le nouvel album. Et puis encore plus de concerts, s’il vous plaît ! Nous voulons tourner autant que possible. Il n’est pas facile aujourd’hui d’organiser une tournée pour des groupes inconnus comme le nôtre, mais je suis optimiste quant au futur.
J’ai vu que tu écris de la musique pour des films et des pièces de théâtre. Le résultat est-il très différent de CashMERE ? Je n’aimerais pas que cette information soit mal comprise. Je ne suis pas une importante compositrice pour le théâtre ou le cinéma. J’ai écrit de la musique pour une petite animation appelée « The Hatter », et pour un film muet de 1913, « Der Student von Prag », pour une représentation unique à Cracovie. J’ai aussi travaillé sur la partition d’une pièce de théâtre de mes amis, mais le projet a été suspendu pour quelque temps. Ce travail est très différent de CashMERE, plus illustratif, plus cinématique, je pense. « The Hatter » ressemblait plutôt à la rencontre entre Steve Reich et des animaux bizarres. « Der Student von Prag » se rapprochait plus de la musique de Kronos Quartet.
Un dernier mot pour les lecteurs de Progressia et les fans de CashMERE ? Merci d’avoir pris le temps de découvrir notre travail. Nous espérons que vous trouverez notre musique intéressante et que vous irez plus loin. Nous aimerions avoir des nouvelles de tous nos fans français. J’espère que l’on pourra vous rendre visite et donner quelques concerts dans votre pays !
Propos recueillis par Jérémy Bernadou
site web : http://www.cashmere.art.pl
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